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Régularisation de sans-papiers de l’Opéra-Bastille ?

Carine Fouteau *

En date du 4 juin 2010, nous publions un article sur la mobilisation des sans-papiers qui occupaient les escaliers de l’Opéra-Bastille à Paris. Cet article était accompagné d’une vidéo des sans-papiers. Ils argumentaient les raisons pour lesquelles ils «bossaient ici et resteraient ici». Un document efficace et poignant.

Voici des informations sur la suite de cette bataille, qui n’est certes pas encore gagnée, mais qui illustre l’importance d’une bataille continue sur la durée. (Réd.)

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Pendant plusieurs mois, le ministre de l'immigration a opposé une fin de non-recevoir aux demandes de discussions des travailleurs sans papiers, soutenus par onze organisations syndicales et associations, parmi lesquelles la CGT, la CFDT, Solidaires, la FSU et la Cimade [Service œcuménique d’entraide qui appuie les étrangers migrants]. Mais c'était sans compter la détermination de plusieurs milliers de grévistes qui ont cessé le travail depuis octobre 2009 pour obtenir leur régularisation.

Vendredi 11 juin 2010, une délégation a été reçue au ministère d'Éric Besson, après deux premiers rendez-vous en mai, et avant une réunion «conclusive» dans «quelques jours». Partis du principe, il y a quelques semaines, qu'«aucune modification» n'était «à l'étude», les services du ministre admettent désormais qu'«il convient de regarder si des ajustements sont nécessaires». À l'issue de la rencontre, dans la soirée, les représentants des syndicats, «très satisfaits», notaient des «avancées considérables». «Le ministère nous a promis un texte simplifié, applicable partout et contraignant pour la fin de la semaine prochaine», indique Brigitte Cerf, pour la FSU. Du côté du ministère, on affirmait que «globalement, ça s'est bien passé, voire très bien passé».

Depuis huit mois, les grévistes, au nombre de 6000 selon leurs soutiens, demandent des «critères clairs» de régularisation. S'inscrivant dans le cadre de l'article 40 de la loi Hortefeux de novembre 2007, qui a créé un dispositif de régularisation pour motif professionnel, ils dénoncent les inégalités de traitement des dossiers d'une préfecture à l'autre et jugent que la circulaire du 24 novembre 2009 a aggravé la situation.

«Les représentants du ministère ont reçu les préfets, ajoute la syndicaliste, et ils reconnaissent des distorsions. Ils se sont engagés à accélérer les procédures et à les rendre plus fiables.» Selon elle, seraient régularisables les personnes munies d'une promesse d'embauche (CDI ou CDD d'un an) et ayant été déclarées douze mois sur deux ans. «Il n'a pas été question de durée de présence sur le territoire et le ministère nous a assuré que les huit mois de grève seraient comptabilisés comme du travail, ce qui signifie que la plupart des grévistes pourraient être régularisés», poursuit-elle. Des aménagements seraient à l'étude pour les intérimaires ainsi que pour les femmes non déclarées employées dans le secteur des services à la personne.

Par ailleurs, toujours selon Brigitte Cerf, présente lors de la réunion au ministère de l'immigration, les sans-papiers pourraient obtenir une autorisation provisoire de travail lors du dépôt de leur dossier, qui serait d'abord examiné dans les directions départementales du travail avant d'être transmis aux préfectures correspondant au lieu de travail des personnes. «Enfin on avance, enfin on a été entendus», se réjouit-elle.  

D'un côté comme de l'autre, on indique que les échanges vont se poursuivre d'ici la fin de la semaine prochaine. Restent plusieurs questions en suspens sur le travail au noir (non déclaré), sur le statut du «texte» (circulaire ou pas) et sur les marges de manœuvre dont disposeront les préfets, dotés actuellement d'un pouvoir «discrétionnaire» dans le traitement des dossiers. Reste enfin à savoir si le gouvernement entend limiter dans le temps cette procédure de régularisation, comme il l'avait fait à l'été 2006 pour les parents d'enfants scolarisés, ou s'il est prêt à s'engager dans la durée.

* Publié sur le site Mediapart.

(14 juin 2010)

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