Israël

 

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Premières réflexions à propos des élections

Sergio Yahni *

Les résultats des élections du 10 février 2009 ont été largement diffusés: le Kadima de Tzipi Livni a obtenu 28 sièges (contre 29 dans le parlement sortant), le Likoud de Netanhayou 27 (contre 12), le Israël Beiteinou d’Avigdor Lieberman 15 (11), le Parti travailliste de Barack 13 (19), le parti ultra-religieux Shass 11 (12).

Les négociations pour la formation d’un gouvernement disposant d’une majorité à la Knesset sont difficiles.

Les résultats de ces élections traduisent, au-delà de la conjoncture, les effets de la nature coloniale de l’Etat. Ils ne peuvent qu’être antagoniques avec des «valeurs démocratiques». C’est ce que souligne, à sa manière, l’historien Tom Segev lorsqu’il déclare: «Les 40 dernières années ont vu naître trois générations pour lesquelles l’occupation des territoires palestiniens est une chose naturelle. Il est très difficile de faire partie d’un système qui érige l’oppression en routine et continuer en même temps de croire à la démocratie.» (Le Temps, 10 février 2006)

Nous publions ci-dessous une première analyse issue de l’AIC (Centre d’information alternatif), réunissant Palestiniens et Israéliens. (Réd.)

Les élections législatives du 10 février 2009 à la dix-huitième Knesset (parlement de l’Etat hébreu) se sont déroulées à cause des multiples affaires de corruption auxquelles était mêlé Ehud Olmert.

Toutefois, le contenu de ces élections a été radicalement modifié par l’offensive militaire israélienne contre Gaza durant la fin décembre 2008 et le début janvier 2009.

L’offensive militaire contre Gaza et les manifestations importantes de protestation organisées par les Palestiniens citoyens d’Israël  ont centré la campagne électorale sur deux questions prioritaires. La première: quelle doit être la paix proposée par Israël et sa politique de sécurité ? La seconde: quelles doivent êtres les relations entre l’Etat et sa minorité palestinienne ?

Ces questions divisent la population israélienne et ont conduit à la disparition de l’agenda politique du centre-gauche [Parti travailliste] dans presque tous ses différents aspects.

D’une part, il y a un nouveau consensus israélien  qui rejette clairement tout pas en avant dans le processus de paix. Cependant, selon les circonstances, des forces du centre seraient prêtes à continuer des négociations avec l’actuelle Autorité Palestinienne (AP). Mais, elles ne seraient pas prêtes à faire des concessions significatives.

D’autre part, la minorité palestinienne d’Israël et ses partis politiques rejettent clairement la politique de violence qui caractérise l’Etat d’Israël. En outre, la minorité palestinienne d’Israël et les partis politiques qui traditionnellement la représentent – l’Assemblée nationale démocratique, Ra’am-Ta’al (Mouvement Arabe pour le Renouveau) et Hadash (Front Démocratique pour la Paix et l'Egalité) – ont réussi a mobilisé pour eux et leurs objectifs une fraction de la population juive.

Cela a conduit à l’élimination de la scène politique des «libéraux» (au sens anglo-saxon) bien intentionnés. Des partis comme le Meretz (parti sioniste qui est membre de l’Internationale social-démocrate) et le Mouvement des verts ont obtenu un certain soutien parmi la population des kibboutzim et au sein de secteurs des «classes moyennes» de Tel Aviv.

Enfin, le Parti travailliste, avec son programme de paix-avec-la-sécurité qui a appuyé l’offensive d’Israël contre Gaza, a démontré qu’il n’était plus une référence effective pour la population juive et palestinienne d’Israël.

Le processus électoral qui commença sous le signe d’une affaire de corruption s’est transformé en un plébiscite portant sur le pouvoir de l’Etat et sur les droits démocratiques.

Les vainqueurs furent ceux qui revendiquent un Etat fort prévalant sur les droits démocratiques. Et seulement le risque d’un isolement international peut empêcher la mise en place d’une coalition gouvernementale à la tête d’un tel Etat fort [mettant en cause les droits démocratiques internes à l’Etat hébreu]. Cette coalition pourrait inclure le Likoud, le Israël Beitenou [«Israël est notre maison»] d’Avigdor Lieberman, le Shass [parti hyper-religieux] et le United Torah Judaïsm [parti ultra-orthodoxe], le Jewish Home [un parti religieux de la droite dure, constitué récemment]. Une telle coalition permettrait de réunir 65 élus à la Knesset (sur 120), donc une majorité, bien que de nombreux désaccords la diviseraient.

Une coalition alternative pourrait inclure le Likoud [de Netanyahou], Kadima [de Tzipi Livni] et le Parti travailliste [de Ehoud Barack]. Une telle coalition réunirait 70 députés et disposerait d’une légitimité internationale. Néanmoins, un tel gouvernement serait très instable et marqué par des contradictions internes.

La gauche non-sioniste de Al-Tajamo’a, de Hadash et du United Arab List [connu en hébreu sous le nom de Ra’am] – qui exprime un projet démocratique intransigeant – a renforcé sa présence parlementaire. Néanmoins, les divisions entre ces trois partis, qui tous partagent des programmes et des pratiques parlementaires analogues, les empêchent, actuellement, de devenir un pôle d’attraction pour un secteur de la société israélienne.

L’instabilité prévisible d’une coalition gouvernementale à venir nous pousse à penser que de nouvelles élections pourraient avoir lieu dans les deux ans. Il est nécessaire qu’en vue de telles élections la gauche démocratique s’unisse et présente une alternative face aux forces fascistes qui grossissent au sein de la société israélienne. (Traduction A l’Encontre)

* Sergio Yahni est un des animateurs du Alternative Information Center (AIC), sis à Jérusalem.

(15 janvier 2009)

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