Ossétie

Qu’est-ce que l’Ossétie du Sud (réd.)

Le peuple ossète est divisé par la barrière naturelle que constitue le Caucase, qui a toujours été invoquée par la Russie et la Géorgie, avant tout soucieuses de défendre leurs intérêts géopolitiques dans la région, pour empêcher la formation d’une entité unique et cela contre la volonté maintes fois réaffirmée des Ossètes. Dans la période soviétique, l’Ossétie du Sud est rattachée avec le statut de région autonome à la République de Géorgie, et l’Ossétie du Nord prend en 1936 le statut de République socialiste soviétique autonome d’Ossétie. A la fin de l’Union soviétique, l’Ossétie du Nord est rattachée à la Fédération de Russie, l’Ossétie du Sud à la Géorgie indépendante. Sur les 620’000 Ossètes, 400’000 vivent en Ossétie du Nord, 70’000 en Ossétie du Sud, les autres se trouvent essentiellement en Russie. Alors que les Ossètes du Sud réclament une nouvelle fois, par referendum, le droit à la réunification avec l’Ossétie du Nord, le pouvoir géorgien s’attache à réduire militairement cette volonté d’autonomie. Les attaques de l’armée géorgienne se multiplient dès 1991 et prennent la forme d’une véritable guerre au printemps 1992: une centaine de villages ossètes sont détruits, la capitale Tskhinvali est assiégée (un siège que certains ont pu comparer à celui de Sarajevo, couverture médiatique en moins). 8000 Ossètes perdent la vie, beaucoup d’habitants se réfugient en Ossétie du Nord, le pays est entièrement dévasté. L’intervention de la Russie et les pressions exercées sur la Géorgie débouchent sur les accords de Sadomys en juin 1992. Une force d’interposition tripartite (Ossètes, Géorgiens, Russes) est chargée de la faire observer. Mais le conflit est simplement gelé. En 2006, un nouveau référendum donne 90% des votants pour l’indépendance. A la même époque, suite à l’élection de M. Saakhachvili, le pouvoir géorgien multiplie les manœuvres pour reprendre le contrôle de l’Ossétie du Sud: les villages géorgiens en territoire ossète sont rattachés directement à la Géorgie, un président «alternatif» pro-géorgien, D. Sanakoev, est nommé pour contrer le pouvoir du président élu. Dans la nuit du 7 au 8 août 2008 les forces armées géorgiennes envahissent Tskhinvali. Elles sont repoussées suite à l’intervention de l’armée et de l’aviation russes qui entrent sur le territoire géorgien. Fin août 2008, l’Ossétie du Sud proclame son indépendance, aussitôt reconnue par Moscou.

 

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Une victoire volée

Olga Miriassova

Nous publions, ci-dessous, le reportage effectué en Ossétie en septembre 2008 par Olga Miriassova, collaboratrice à l’Institut Action collective de Moscou.

En septembre 2008, un mois après l’agression de la Géorgie contre l’Ossétie du Sud, Olga Miriassova, militante libertaire, travaillant à l’Institut Action collective de Moscou, se rend en Ossétie du Sud. Son objectif: partir à la rencontre des Ossètes pour comprendre comment la population avait «vécu» le conflit. Et par là même, dépasser une vision géopolitique de la guerre, où la dénonciation à distance de l’horreur se combine à une logique des «camps», dans le cas présent, d’un côté, la Géorgie (avec à ses côtés les Etats-Unis, l’Union européenne et tous les médias), de l’autre, la Russie. Pour Olga, pas question de choisir «son» camp, mais, par un dialogue attentif et exigeant avec les gens d’en bas, construire un autre espace.

Le texte qu’elle en a rapporté est un regard lucide et sans complaisance sur une société décomposée par une guerre qui dure depuis le début des années 1990 ; une enquête qui déconstruit tous les discours qui visent à formater le conflit, à commencer par celui du pouvoir en Ossétie du Sud surtout soucieux d’instrumentaliser les victimes ; un premier pas aussi pour faire émerger ce que pourrait être un espace de solidarité concrète, qui ne passe pas par une identification aussi abstraite que démagogique avec les «victimes». – Réd.

Nous retrouvant en Ossétie en ce mois de septembre, il nous était très difficile de rester indifférent. Impossible de ne pas se sentir solidaires des tragédies qui avaient frappé les habitants. Chacun avait hâte de partager ce qu’il avait vu et ressenti pendant les journées de guerre. Nous étions fortement impressionnée par l’attention et l’intérêt que les gens manifestaient les uns pour les autres – comparée à la Russie, la petite société ossète est plus solidaire, rien ne sert de vouloir cacher quelque chose et, de toute façon, à quoi bon ! Comme le disait la propriétaire de la maison où nous logions, si on remonte aux «sources», tout le monde en Ossétie est parent, et les rapports entre les personnes ne sont pas les mêmes que chez les autres peuples.

Face à la tragédie, les gens sont vraiment en sympathie les uns avec les autres et s’efforcent de s’entraider. Durant notre séjour, 40 jours après les morts des événements des 8-12 août, les parents des victimes organisent des cérémonies à leur mémoire, qui réunissent tous ceux qui connaissaient, un tant soit peu, le disparu – parfois plusieurs centaines de personnes. L’organisation de telles cérémonies n’est pas chose facile et coûte cher, aussi tous les parents proches et les voisins viennent aider. Nombreux sont ceux qui ont perdu leur maison et qui vivent chez des voisins, certaines maisons abritent trois familles.

Malgré tout les habitants d’Ossétie gardent une étonnante force de vie et ne perdent pas le sens de l’humour. Ceux qui au cours des vingt années de ce conflit armé rampant ne sont pas partis ont profondément à cœur le pays et son avenir.

Le conflit

Soulignons tout de suite que nous avons parlé uniquement avec des Ossètes et des personnes d’autres nationalités (y compris des Géorgiens) qui ont choisi de rester en Ossétie du Sud et qui, par conséquent, dans le conflit entre les deux états, se rangent du côté des Ossètes. Nous n’avons pas réussi à trouver des personnes qui se disent neutres dans ce conflit, renvoyant les deux camps dos à dos ou encore prenant le parti des Géorgiens. Rien d’étonnant à cela, les habitants de Tskhinvali et des localités les plus proches se sont trouvés sous les déluges de feu, ont vécu au minimum quelques heures dans la ville occupée, ont connu une peur intense, ont perdu des proches et, lorsqu’ils n’en ont pas été eux-mêmes les témoins, ont entendu de nombreux récits sur les violences qui ont frappé des civils pacifiques. Fatima, enseignante à l’université, nous a raconté qu’elle et sa fille avaient eu peur de se cacher dans la cave de leur maison, et que son fils, milicien, leur avait apporté un fusil-mitrailleur, car les soldats géorgiens se trouvaient déjà dans les rues avoisinantes. Une habitante de la rue Thaelmann a passé deux jours et deux nuits terribles dans les caves de l’ancien centre culturel juif, où s’étaient réfugiées environ 150 personnes. Parmi elles il y avait une femme blessée, que l’on ne pouvait pas emmener à l’hôpital et qui souffrait terriblement faute de médicaments. Un homme aussi était mort, il avait été atteint par des éclats de bombes juste dans l’escalier qui conduisait à la cave. Le fracas des bombes à Tskhinvali était si fort que les gens dans les caves étaient persuadés que d’un moment à l’autre les murs qui les protégeaient allaient s’écrouler sur eux. Dans la ville les télécommunications ne fonctionnaient pas plongeant les gens dans l’ignorance du sort de leurs proches.

Un mois après le conflit, les émotions sont toujours très fortes. Aucune des personnes que nous avons interrogées (environ 20 personnes) ne peut imaginer une coexistence pacifique des Ossètes avec les Géorgiens. Les habitants d’Ossétie du Sud font un net partage des Géorgiens entre les «nôtres» et les autres. Mais en réalité, l’hostilité à l’égard des Géorgiens n’est pas ethnique mais plutôt ethnico-politique, et est fonction du rapport de chacun à la question de l’indépendance de l’Ossétie du Sud et du droit que s’attribue la Géorgie à agresser ce pays. Après le conflit du 8 – 12 août des Géorgiens et des familles mixtes sont restés en Ossétie du Sud, et les Géorgiens qui habitent aujourd’hui Tskhinvali vivent et travaillent pacifiquement avec les Ossètes qu’ils côtoient. En outre, il y a beaucoup de mariages mixtes entre Géorgiens et Ossètes, et le conflit a séparé de nombreuses familles. Des femmes ossètes sont parties avec la famille de leur mari en Géorgie et des Géorgiennes sont restées en Ossétie. Les unes comme les autres, pendant longtemps encore, ne pourront pas sans difficultés rendre visite à leurs familles, rencontrer leurs frères et leurs sœurs.

Une des caractéristiques de l’Ossétie est que les villages géorgiens sont étroitement mêlés aux villages ossètes ; souvent ils ne sont qu’à quelques centaines de mètres les uns des autres, ce qui donne lieu à des contacts permanents. La ligne de partage qui pour les Ossètes divise les Géorgiens entre les «nôtres» / les autres s’étend à des villages entiers et prend aussi en compte les positions de personnes concrètes dans ce conflit déjà ancien et leur conception des rapports de voisinage avec les Ossètes. Selon les dires des Ossètes, si les Géorgiens se sont conduits pacifiquement et avec respect, leurs villages n’ont pas été touchés même lors des récentes opérations de nettoyage. Par exemple, au nord de Tskhinvali il y avait toute une enclave de villages géorgiens, qui aujourd’hui sont pratiquement tous incendiés. D’un côté, entre ces villages et Tskhinvali il y avait un commerce important, de l’autre, depuis quelque temps, il était risqué pour les Ossètes de passer par ces villages, et la route qui les traversait était fermée. On raconte qu’à différentes reprises «on tirait au fusil-mitrailleur sur les voitures des Ossètes». A différentes reprises on nous a raconté l’histoire de dix jeunes gens de nationalité ossète avaient été sortis d’un bus qui passait par ces villages, battus à mort et enterrés vivants. Nous n’avons pas l’intention de chercher à savoir si de telles histoires sont véridiques. Le fait est que lors d’affrontements avec des Géorgiens ou suite à des actes terroristes plusieurs dizaines d’Ossètes mouraient chaque année. Voici le point de vue d’un homme d’âge mûr qui nous a ramené de Tskhinvali à Vladikavkaz. Il considère que la faute à tout cela réside dans la surabondance actuelle d’armes en Ossétie: «Avant toutes ces guerres, avant 1990, la jeunesse au Caucase n’était pas moins bagarreuse qu’aujourd’hui. Mais auparavant on se battait à coups de poings, un contre un, et cela n’empêchait pas d’aller ensuite faire la fête ensemble au café. Aujourd’hui, au moindre problème, chacun court chercher son fusil-mitrailleur à la maison». Vrai ou non, le fait est que les Ossètes devaient éviter l’enclave en empruntant une route beaucoup moins commode.

Il y a quelques années, dans le village d’Anevi (peuplé de Géorgiens), à l’ouest de Tskhinvali, par où passe une route qui mène à des villages ossètes, les Géorgiens ont installé un poste de police et des services spéciaux. Les habitants de Tskhinvali racontent que les policiers, sans la moindre raison, pouvaient bloquer des voitures ossètes, insulter et humilier les passagers. Les habitants d’Anevi ne s’étaient manifestés en rien mais cela n’a pas empêché que leur village soit incendié en août de cette année. Les opinions à ce sujet parmi les Ossètes divergent: certains considèrent que les habitants n’auraient pas dû accepter la présence sur leur territoire d’un poste de police, d’autres au contraire estiment que les habitants n’y étaient pour rien et qu’il n’aurait pas fallu toucher au village. Comme cela se produit habituellement dans les conflits interethniques, lorsqu’on assiste à une aggravation du conflit, le principe de responsabilité collective se met en route. Le fait que la grand-mère Nino soit venue des années durant vendre son lait à Tskhinvali et n’ait jamais insulté personne sans parler du fait que l’on ignore qui tirait sur les Ossètes, est devenu sans importance. La «rumeur» a suffi pour condamner les villages géorgiens à être anéantis. En août 2008 au moins huit villages géorgiens ont été détruits. Les habitants sont partis d’eux-mêmes ; quant à ceux qui n’avaient pas réussi à partir à temps ou qui n’en avaient les moyens, on les a embarqués dans des bus avec un minimum d’affaires et on les a amenés dans les montagnes pour que leurs parents ou des militaires géorgiens viennent les chercher. Des amis ossètes des réfugiés ont tenté en vain de sauver leurs maisons – toutes ont fini dans les flammes. La question de savoir qui l’a fait, soldats russes, miliciens ossètes ou pillards, est secondaire. Dans leur majorité les habitants ont applaudi à ces incendies – ils ne veulent surtout pas que les Géorgiens qui vivaient dans ces villages reviennent.

Pillages

Condamner les actes de pillage dans les villages géorgiens est assez naïf compte tenu de la haine tenace pour leurs habitants. En Ossétie quasiment personne ne cherche à dissimuler ces actions. Les maisons avaient été détruites – par des tirs ou par le feu. Les villages abandonnés étaient transformés en immenses champs de débris et de ruines, où il était encore possible de trouver quelque objet de valeur. Quant au bétail abandonné, les habitants des villages alentour s’en sont occupés dès les premiers jours (fallait-il laisser les vaches non traites mourir dans les cours des maisons ? ou encore demander à l’ONU d’organiser le transfert du bétail jusque dans les camps des réfugiés ?). Des grand-mères emmènent sur des poussettes des vieux vêtements, des gamins un peu voyous embarquent des antennes paraboliques et des ordinateurs. Sur un mode ironique ils désignent eux-mêmes leur activité comme du pillage. Les Ossètes qui ont perdu leur maison et leurs biens considèrent cela comme une juste compensation pour la perte de leurs parents et de leurs proches. Seuls ceux qui jugent méprisable (ce qui est parfaitement compréhensible) d’aller fouiller dans les affaires des autres et d’emporter chez eux un objet marqué du sceau de la tragédie ne vont pas dans les villages géorgiens.

La vie dans la guerre

Les habitants d’Ossétie ont pris l’habitude de compter avant tout sur eux-mêmes. Lors des conflits avec les Géorgiens au début des années 1990 ils n’ont pu compter que sur leurs propres forces, et à l’époque rares étaient ceux qui détenaient une arme. Ils récupéraient des fusils que les vieux avaient cachés, utilisaient pour se défendre des barres de fer. Depuis 1992, seize ans se sont écoulés mais la cruauté de l’armée géorgienne reste vive dans les mémoires. Dans les discussions tout le monde évoque les 117 villages ossètes incendiés à l’époque et demande: où était à l’époque la communauté internationale ? La seule aide humanitaire est arrivée d’Allemagne et personne n’a condamné les agissements de la Géorgie. Dans certaines maisons, en souvenir de cette époque, on trouve conservé dans des bocaux du pain arrivé dans les colis allemands – un pain au goût acide, à peine mangeable. Le fait que ces événements soient lointains ne les rend pas moins tragiques. Et beaucoup évoquent les purges de 1920 dont ils ont entendu parler par leurs grands parents [[1]].

Aujourd’hui l’Ossétie du Sud est une société ultra-militarisée. Chacun détient chez lui des fusils mitrailleurs et des grenades, personnels ou de service. Dans les rues de Tskhinvali des hommes en treillis et pistolets à la ceinture mènent des poussettes avec des bébés et conduisent leurs enfants à l’école. Environ 80% des hommes adultes (soit cinq milles personnes) qui habitent en permanence en Ossétie servent dans l’armée ou dans la milice. Beaucoup n’ont pas d’autre travail. Certains cumulent cela avec un autre travail: à l’hôpital, à l’université, mais c’est une minorité. Les jeunes le plus souvent n’ont pas de profession civile et ne voient pas d’autre possibilité que de servir dans l’armée. Ou alors ils partent étudier dans la «grande terre» en Russie et ne reviennent plus.

Les personnes qui réfléchissent considèrent que cette situation est catastrophique. Le pays se retrouve dans une totale dépendance à l’égard de la Russie qui finance et l’armée et les services sociaux. Il n’y a pour ainsi dire pas d’économie en dehors de la production sur les exploitations individuelles de produits agricoles pour la vente (lait, viande, fromage, fruits) – activité qui était surtout le fait des Géorgiens, et une petite usine de bouteilles d’eau minérale. Il existe un petit commerce lié à l’importation de marchandises en provenance de Russie et d’autres pays, mais cela ne concerne que quelques centaines de personnes. Et eux aussi n’ont pas la vie facile. Certains ont perdu lors du dernier conflit tous leurs stocks. Et les commerces de ceux qui critiquent le pouvoir sont fermés sous divers prétextes. Autrefois, le marché d’Argounets, situé à la frontière de l’Ossétie et de la Géorgie, était très important. Un grand nombre d’Ossètes et de Géorgiens y travaillaient: les Ossètes allaient chercher des marchandises en Russie, les Géorgiens les emmenaient à l’intérieur du pays. Des pommes et d’autres fruits partaient en Russie. Le marché a été fermé par Saakachvili il y a quatre ans, laissant des milliers de personnes sans travail.

Timour, un habitant de Tskhinvali, ancien milicien ayant participé à quatre guerres, considère que le fait de servir en permanence dans l’armée corrompt les hommes, car en temps de paix un soldat est inutile. Pour Timour, chaque homme doit être prêt à se mobiliser comme milicien, mais en temps de paix il doit avoir une profession dans le civil. Quand on sert dans l’armée on perd tout esprit d’initiative et son indépendance, on s’habitue à vivre sans effort. «Le soutien financier de la Russie a eu une influence négative sur les autorités du pays, déclare Timour. Elles n’ont plus besoin de gens qui prennent des initiatives, il leur faut uniquement des gens à leurs bottes.» L’Ossétie du Sud a un réel potentiel de développement économique: la vente de l’eau minérale, le développement de l’agriculture, le tourisme, les gisements de métaux précieux. Mais tant que le budget du pays dépend totalement de la Russie, l’indépendance est purement formelle. «On a envie de passer au plus vite à du positif, à une reconstruction pacifique du pays, nous explique Elina qui travaille comme enseignante. Mais les salaires dans la fonction publique sont misérables, et les prix après le conflit ont nettement augmenté. Mon salaire d’enseignante est de 2500 roubles (un peu plus de 60 euros, NdT), je fais deux services, mais même avec çà je suis en dessous du minimum vital. En janvier 2008 les prix ont augmenté de 10%, et l’inflation continue. Mon fils est dans l’armée, il gagne 6000 roubles (160 euros). Ceux qui ont des grades plus élevés peuvent gagner jusqu’à 12’000 roubles (300 euros). Ce sont les meilleurs salaires qu’on puisse trouver dans le pays, c’est pour cela que tout le monde s’engage dans l’armée. L’aide de la Russie s’élève à 2,8 milliards de roubles (70 millions euros). Impossible de savoir où va cet argent.» D’après les chiffres officiels, le salaire moyen dans la république en 2007 était de 2700 roubles (70 euros), et le taux de chômage de 33%. Ce qui a sauvé les gens ce sont les prix bas pour les produits alimentaires, en provenance des villages avoisinants, l’aide des parents des autres régions et les tarifs peu élevés de certains services comme les transports en commun. Les problèmes sociaux sont devenus beaucoup plus aigus après le conflit du mois d’août. La république s’est vue allouée des sommes considérables, 12 milliards de roubles (300 millions d’euros) prises sur le budget de la Fédération de Russie, et il est prévu d’élever cette somme à 35 milliards de roubles (un peu moins de 900 millions d’euros). Mais pour l’instant les gens n’ont vu qu’une infime partie de cette aide. Certes, la reconstruction de Tskhinvali est en cours, avec une priorité pour les infrastructures sociales: écoles, hôpitaux. On a accueilli dans des sanatoriums en Russie les personnes qui ont fui l’Ossétie. La situation est particulièrement dramatique pour ceux qui restent sans toit ou dans des maisons à moitié détruites et qui ne veulent ou ne peuvent pas partir.

En premier lieu, beaucoup à ce jour n’ont reçu aucune indemnisation. Le 13 septembre, seules 93 personnes dont les maisons avaient été détruites figuraient sur les listes donnant droit à une aide de 50 milles roubles (1200 euros environ). Les autres personnes sinistrées attendent la décision de la commission. 748 personnes sont sur les listes donnant droit à une aide de 1000 roubles (25 euros) – en principe toute personne habitant la république a droit à cette aide, mais compte tenu du caractère dérisoire de cette somme, beaucoup n’ont même pas fait les démarches. Environ mille personnes figurent sur la liste réservée aux retraités donnant droit à une allocation de 3000 roubles (75 euros). Il n’existe apparemment pas de listes pour les personnes ayant en principe droit à une indemnité de 10 à 50’000 roubles (250 à 1000 euros) suite à la destruction d’une partie de leurs biens. Toutes ces listes – affichées à proximité du siège du gouvernement à Tskhinvali – divergent de façon spectaculaire avec les données fournies par le Comité d’Etat pour l’information et la presse de la République d’Ossétie du Sud, y compris si l’on fait l’hypothèse qu’une partie de l’aide est distribuée dans les villages et que l’information à ce sujet n’est pas accessible à Tskhinvali.

Les gens désespèrent de plus en plus de recevoir une aide effective. Dans cette affaire les rumeurs en tous genres ont joué un rôle non négligeable (et aujourd’hui il est difficile de savoir dans quelle mesure elles venaient de source officielle). Au départ le bruit a couru que tout habitant de la république recevrait une aide d’un montant de 500’000 roubles (10’000 euros), chiffre ensuite retombé à 50’000 roubles (1000 euros). Finalement, il a été dit que seules les familles ayant perdu leur maison toucheraient cette somme ; quant à ceux dont les biens ont été en partie détruits ils toucheraient entre 10 et 50’000 roubles. Aujourd’hui encore la moitié des habitations de la ville sont sans vitres, et dans les dépôts il est impossible de trouver du verre. Pour recevoir des matériaux sans payer il faut passer par trois bureaux au Comité exécutif de la ville et attendre la décision d’une commission. Une fois obtenu le bon, il faut faire chaque jour le siège du dépôt dans l’attente de l’arrivé des matériaux souhaités. Une fois que les matériaux sont là, il faut en organiser à ses frais le chargement et le transport. Cela n’est possible que pour des hommes jeunes et forts, et autant que possible ne travaillant pas. Les personnes socialement démunies, elles n’ont guère de chance de retrouver des conditions de vie acceptables.

Pour ce qui est de la distribution des autres formes d’aide humanitaire – produits alimentaires et de première nécessité – ce ne sont que bousculades et scandales. Beaucoup ont renoncé à les recevoir, car c’est perdre son temps et user ses nerfs. Une femme, mère de deux enfants, m’a fait part de ses malheurs: «Plein de monde défile, on débarrasse ce qui reste de ma maison, mais moi qu’est ce que j’ai avec tout çà ? Les voisins ont au moins reçu une tente équipée pour l’hiver, moi je vis chez des voisins et quand ils vont rentrer dans quelques jours, où est ce que je vais aller ? Je ne reçois aucune aide.» Au cours de la discussion, il s’est avéré qu’elle bénéficiait quand même d’une aide, mais qu’elle considère comme insuffisante. Ses enfants sont dans un sanatorium en Russie. Elle reçoit parfois des produits alimentaires et la commission pour sa maison s’est déjà réunie. Il n’en reste pas moins que les gens se sentent abandonnés – personne pour l’instant n’a donné d’indication sur la manière dont allaient passer l’hiver les gens dont les maisons étaient inhabitables. Et on ne promet pas de nouveaux logements dans les mois à venir. N’oublions pas qu’ici l’hiver ce n’est pas rien.

Tskhinvali

Globalement on peut dire que la ville a retrouvé une vie normale, on observe avec plaisir les rues animées, les bandes bruyantes d’écoliers – à Tskhinvali, en dépit de tous les discours sur la crise démographique, il y a plein d’enfants. Les magasins et les marchés fonctionnent. On cuit le pain, des maisons sont en cours de reconstruction, dans les rues se dressent les installations du Ministère des situations extraordinaires, le courrier marche, la radio aussi. C’est pour l’eau et le gaz que la situation reste mauvaise: il y a des coupures d’eau et dans nombre de maisons il n’y a pas de gaz. Et les coupures d’électricité sont fréquentes. Les bains publics ne fonctionnent pas, les élèves de quatre écoles ont dû être accueillis dans d’autres établissements, la rentrée scolaire a été reportée dans certains établissements.

Mais on ne peut pas parler de catastrophe humanitaire à l’échelle de la ville. Ceux qui sont le plus touchés sont ceux qui ont perdu des parents ou des proches. Les autres – avec un optimisme variable – attendent qu’une solution soit trouvée à leurs problèmes.

Chiffres

Un des moments essentiels de la discussion sur «qui est coupable ?» est le chiffre des victimes en Ossétie du Sud. Les premiers jours du conflit les autorités ont annoncé le chiffre de 1 500 victimes. Chiffre qui est ensuite monté à 2000. Le 11 septembre, le Comité d’Etat pour l’information et la presse annonçait encore le chiffre de 1692 victimes. Les organisations de défense des droits de l’homme rendaient publiques leurs estimations: selon eux au cours du conflit du mois d’août n’auraient péri que quelques dizaines de personnes. La vérité se trouve, selon toute vraisemblance entre les deux. Compter les morts n’est pas une activité très morale. Chaque disparu est une immense tragédie, une seule victime c’est déjà une perte incommensurable pour ses proches. Mais la question des chiffres est importante dans la mesure où dès les premiers jours ils ont été utilisés par la propagande pour prouver les exactions de l’armée géorgienne.

Le 10 septembre, la Commission sur les crimes de guerre en Ossétie du Sud a publié une liste de 311 noms. Pour 121 d’entre eux on ignore le lieu où ils ont été enterrés – ce qui signifie que ces personnes peuvent encore être en vie, être parties laissant leurs proches sans nouvelles ou encore avoir échappé à l’incendie de leurs maisons, alors même que pour les voisins elles y ont péri, etc. Au cimetière du village de Tbet le 12 septembre on comptait 30 tombes récentes, et 40 au cimetière Sgoudersk à Tskhinvali Ce sont les deux cimetières les plus proches de la ville, et une partie des habitants enterrent leurs parents dans les villages. Pour une ville de 25’000 habitants le chiffre moyen de décès par mois est de 32 personnes. Sur la liste des disparus figurent 16 personnes enterrées au cimetière de Tbet et 25 à celui de Sgoudersk. Les autres, selon toute vraisemblance, sont des décès de mort naturelle survenus entre le 10 août et le 10 septembre. Ce qui signifie que dans ces deux cimetières il n’y a pas d’autres victimes du conflit. D’après la liste de la commission, une partie importante des victimes ont été enterrées dans la cour des maisons (87 personnes), à Vladikavkaz (38 personnes) et dans les villages (23 personnes). Même si l’on extrapole le chiffre de 190 victimes, ce chiffre et l’on tient compte des cas d’enterrements dans les cours et les villages ne figurant pas sur la liste, ainsi que les personnes disparues, ce chiffre de 190 peut tout au plus être multiplié par deux. En d’autres termes, le nombre des victimes sur le territoire de l’Ossétie du Sud pendant le conflit du mois d’août ne dépasse pas 400 personnes (compte non tenu des soldats de l’armée russe).

Mais faire une distinction entre les civils et les miliciens, comme le font les défenseurs des droits de l’homme, et affirmer que le nombre des victimes ne dépasse pas quelques dizaines de personnes, nous paraît non fondé. En premier lieu, un membre de la milice n’est pas un militaire servant en permanence dans son unité. Beaucoup de miliciens la nuit du 8 août dormaient chez eux et, sous le déluge des bombes, ils avaient difficilement la possibilité de se rendre jusqu’à leur section. De plus, comment distinguer ceux qui sont tombés alors qu’ils tiraient sur des tanks, de ceux qui sont morts victimes d’un éclat d’obus alors qu’ils apportaient de l’eau aux habitants réfugiés dans les caves ? En second lieu, les gens à Tskhinvali ont pris les armes sans pour autant être dans la milice, car ils comprenaient que s’ils ne défendaient pas eux-mêmes leur ville, personne ne le ferait à leur place. Troisièmement, au moins 50 civils (et selon toute vraisemblance, beaucoup plus) sont morts les 8 et 9 août sur la route de Zar, alors qu’ils s’efforçaient de quitter la ville. Les tanks géorgiens tiraient sur les voitures et les écrasaient – dans chaque voiture il y avait de 3 à 7 personnes. Entre le 10 et le 12 septembre, nous avons découvert 13 carcasses de voitures. Des témoins affirment que quelques jours après le conflit on en décomptait 50.

L’obstination du Comité d’Etat à l’information à maintenir des chiffres surévalués est incompréhensible. Fournir des données mensongères jette le doute toutes les autres informations. Le Comité se réfère à la Procurature de la République, mais apparemment ces deux administrations font preuve d’irresponsabilité pour ce qui est des chiffres rendus publics. Comment expliquer qu’en un mois elles n’ont pu établir les noms de seulement 18% des victimes ? Si tel est bien le cas, alors autant confier le travail à des commissions citoyennes.

En fait, il y a une explication à tout cela: personne ne veut renoncer au chiffre impressionnant de 1690 victimes donné au départ: non seulement cela prouverait l’incompétence de ces deux administrations, mais mettrait en doute l’idée de génocide, largement utilisée par la propagande anti-géorgienne. Pour un petit peuple comme les Ossètes 10, 100, 400 morts c’est énorme. En plus nous ne savons pas quel aurait été le sort des Ossètes si l’armée géorgienne avait pris le contrôle de la République. En tout cas, on peut dire que le génocide n’a pas eu lieu. Dieu soit loué.

Qu’est ce qui a sauvé le peuple ossète ? Le déluge de feu sur la ville a été terrible tant par son ampleur que par son côté aveugle. Il n’en reste pas moins qu’un grand nombre d’habitants ont réussi à se réfugier dans des caves, ce qui les a sauvés. Beaucoup, prévenus par des parents des villages géorgiens, avaient quitté la ville peu avant le début du conflit et réussi à mettre leurs enfants à l’abri hors du pays. Les forces armées géorgiennes ont fait preuve d’une très grande cruauté, détruisant les voitures remplies de réfugiés ; elles ont également, à différentes reprises, tiré sur des habitations, sur l’hôpital, les écoles et les bâtiments du gouvernement. Mais cela n’a été le fait que d’une partie des soldats géorgiens. Certains habitants de Tskhinvali font remarquer que le 8 août, tant qu’il n’y a pas eu de morts dans leurs rangs, les soldats géorgiens ne s’attaquaient pas aux civils – il leur arrivait de demander de l’eau et de parler avec les habitants. Mais le lendemain la logique de la guerre a joué à plein: les cruautés de part et d’autre, la lutte pour la vie, les tirs ravageurs (certains participants aux actions militaires du côté ossète ont évoqué des actes de cruauté commis à l’encontre des soldats géorgiens sans manifester le moindre regret). Enfin, les troupes géorgiennes n’ont pas occupé tous les quartiers de la ville et, de toute façon, l’occupation a été de courte durée).

«Une victoire volée»

D’après les dires des Ossètes, c’est ainsi qu’un membre des forces armées russes a caractérisé la manière dont les médias russes ont traité des opérations militaires à Tskhinvali. Sur la base de très nombreux récits nous avons compris que le mérite de la libération de Tskhinvali revient pour plus de la moitié aux miliciens ossètes et au petit nombre de Russes de la Force d’interposition mixte qui ont survécu à la première attaque des Géorgiens. Tout en exprimant leur reconnaissance à l’égard de l’armée russe qui les a soutenus avec son aviation et son artillerie, les Ossètes insistent sur le fait qu’il était impossible d’attendre les libérateurs venus de Russie. Les troupes géorgiennes sont entrées dans la ville au milieu de la journée du 8 août. Le matin du 8 août les miliciens et les militaires ossètes attendaient les ordres, en s’efforçant de comprendre la tournure que prenaient les événements. Mais Koïkoty et les autres dirigeants avaient quitté précipitamment la ville pour aller se mettre à l’abri à Djava, à une distance sûre, et ils n’étaient pas en mesure de donner des directives valables. En conséquence, les défenseurs de la ville ont agi en se laissant guider par le bon sens et en fonction de la situation dans les quartiers. Il y avait très peu de lance-grenades, et avec un fusil automatique pas question d’attaquer un tank. Au début les jeunes étaient très démoralisés suite aux tirs de la nuit. Mais au bout de quelque temps, ils ont réussi à faire basculer la situation: destruction des premiers tanks, capture de l’un d’eux avec son équipage forcé de tirer sur les siens. Le soir du 8 août, les forces armées géorgiennes se repliaient hors de la ville, mais le 9 au matin elles y entraient de nouveau et y restaient jusqu’au soir. Les forces armées russes n’ont fait leur entrée à Tskhinvali que le 10 août, quand déjà il n’y avait plus de Géorgiens dans la ville.

Nous devons préciser que dans le conflit militaire et politique entre la Géorgie et la Russie nous ne prenons pas partie pour un camp contre l’autre. Nous ne faisons aucun crédit aux bonnes intentions de l’un ou l’autre gouvernement, et la question de l’intégrité territoriale ne nous intéresse pas. Il suffit de rappeler comment sur ordre du gouvernement russe l’armée a nettoyé la Tchétchénie pendant plusieurs années sans faire preuve du moindre humanisme pour les populations civiles. Précisons également que l’armée russe ne se serait pas mêlée du conflit en Ossétie si cela n’avait pas servi les intérêts géopolitiques de la Russie. Quant aux autorités géorgiennes elles ont déversé un déluge de feu sur une République qui dormait tranquillement, une république où depuis de longues années elles avaient attisé le conflit interethnique. Il est également prouvé que les deux pays se préparaient depuis longtemps à la guerre, accumulant les forces armées aux frontières de l’Ossétie du Sud. Mais c’est la Géorgie qui a déclenché le conflit, en bombardant Tskhinvali, donnant par là même le droit moral à la Russie d’y intervenir à son tour. Ensuite, ce sont des débats sans fin sur le caractère «adéquat» ou non de leur attitude respective.

Le plus vraisemblable, c’est que les Géorgiens avaient l’intention de mener une guerre éclair jusqu’au tunnel de Roki dont le contrôle leur aurait permis d’empêcher l’entrée des Russes sur un territoire «contesté». Ce qui les a stoppés c’est la résistance inattendue et opiniâtre de la ville de Tskhinvali que les tanks géorgiens ne réussirent pas à prendre d’un coup, conjuguée à la riposte efficace de l’artillerie russe et le franchissement rapide du tunnel de Roki par les tanks russes. Reste à comprendre pourquoi les forces armées russes sont restées si longtemps à Djava, se tenant à bonne distance de la zone de combats et laissant aux seuls Ossètes la tâche de défendre Tskhinvali.

De telles questions, les Ossètes ne se les posent pas, ils ne s’intéressent pas à la «grande politique» et voient dans les Russes des libérateurs longtemps attendus. Et si Koïkoty organisait un référendum, la majorité de la population se prononcerait en faveur d’un rattachement à la Russie. Les gens sont las de la guerre et souhaitent vivre en sécurité.

Diplomatie populaire

En dépit des conflits de 1991-1992 et de 2004 Géorgiens et Ossètes ont continué à vivre côte à côte, ils se mariaient, commerçaient et travaillaient ensemble. A une fondation occidentale qui proposait d’organiser des ateliers sur le thème de la «diplomatie populaire», Fatima, une habitante de Tskhinvali, a répondu: «des ateliers comme ça ont lieu tous les jours au marché». En revanche les déclarations récentes d’Edouard Koïkoty affirmant que rien ne s’opposait au retour des réfugiés géorgiens sont parfaitement cyniques. Les autorités ossètes elles-mêmes ont tout fait pour qu’ils n’aient nulle part où revenir. Beaucoup de villages ont été incendiés et la population ossète reste profondément hostile à l’égard des Géorgiens. Peut-on espérer qu’un jour soit restaurée la coexistence pacifique entre Ossètes et Géorgiens ?

Selon toute vraisemblance, la barrière qui se dresse entre les deux peuples n’est pas définitive. Nombre d’Ossètes font tout de même une distinction entre les politiciens et le peuple et comprennent que les Géorgiens ont aussi été les victimes du conflit politique. Mais il faudra encore beaucoup de temps pour que s’apaise la douleur causée par la perte des proches pour que s’effacent les horreurs de la guerre et que les gens puissent surmonter leurs émotions.

Pour l’heure, la rhétorique nationaliste des autorités reste le principal obstacle à une coexistence pacifique des deux peuples. Elles s’obstinent à nier les erreurs commises et s’efforcent de tirer le maximum de profit politique du conflit.

1. Entre 1918 et1921, des affrontements opposent les Ossètes qui demandent l’indépendance aux forces gouvernementales de la République de Géorgie dirigée alors par les mencheviks. Selon certaines sources, le conflit a fait 5000 morts directs et plus de 10’000 dus à la famine et aux épidémies.

(13 mai 2009)

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