Palestine



Un rapport impressionniste


A propos du rapport de l'ONU, par «L'Initiative palestinienne pour la promotion d'un dialogue global et pour la démocratie»(MIFTAH), 4 août 2002
Le rapport du secrétaire général des Nations unies sur les «événements» de Jénine et des autres villes palestiniennes donne un coup sévère à la crédibilité de l'ONU. Le rapport évite de prendre de façon précise en considération les violations du droit international humanitaire commises par les forces israéliennes; il en résulte qu'il blâme de façon égale Israéliens et Palestiniens. Voué à l'échec depuis le début, les défauts de ce rapport ne sont pas une surprise. A l'origine, une commission d'enquête avait été établie pour accomplir ce travail. Mais Israël s'y opposa. Et l'enquête se réduit à une mission d'établissement de certains faits (sur la base de rapports et témoignages écrits), qui fut acceptée par Israël. Néanmoins, même cela ne correspondait pas aux vúux d'Israël. C'est donc ainsi qu'on en est arrivé à l'établissement de ce rapport qui fut produit en utilisant «les sources et informations à disposition». En substance, l'ONU ne reçut pas la permission d'envoyer des enquêteurs sur place pour réunir une information de première main, mais elle a dû s'appuyer sur l'information mise à disposition par les parties intéressées telles que l'Union européenne ou l'Autorité palestinienne. Israël a refusé fermement à coopérer et n'a pas contribué à ce rapport.

Ce rapport semble ignorer que c'étaient les Palestiniens qui étaient attaqués sur des territoires occupés illégalement par Israël. En accusant les Palestiniens qui faisaient face à l'armée israélienne, ce rapport semble récuser aux Palestiniens le droit à l'autodéfense, ce qui est pourtant garanti dans les déclarations fondamentales des droits l'homme. En outre, le rapport semble aboutir à la conclusion que tous les Palestiniens qui prennent les armes pour combattre contre une attaque israélienne sur le territoire palestinien sont des «terroristes». Même si le rapport fait référence aux assassinats illégaux, à l'utilisation de boucliers humains, à l'usage disproportionné de la force, aux arrestations arbitraires, à la torture et au refus de soins médicaux, il se refuse de condamner ces actes comme des crimes de guerre qui violent la IVe Convention de Genève. Le fait qu'il s'agissait de zones palestiniennes civiles qui ont été attaquées durant des mois au cours de l'opération israélienne est très peu souligné. Entre le 29 mars et le 17 avril 2002, les forces israéliennes elles-mêmes affirment avoir tué 491 Palestiniens et en avoir blessé 1147, dont 80% étaient des civils. Les forces israéliennes ont détruit 2800 foyers de réfugiés et 878 maisons palestiniennes, laissant 17000 personnes sans toit. Sept mille Palestiniens furent arrêtés pour le simple fait d'avoir entre 15 et 45 ans et ils ont été traités brutalement; de plus, ils se virent refuser nourriture, couverture, accès aux sanitaires, et tout contact avec leur famille a été interrompu pour de longues périodes. Même s'il n'y a pas eu de massacre à Jénine en tant que tel, le nombre de personnes tuées en Cisjordanie justifie facilement l'utilisation du terme massacre et, en fait, le terme même de «génocide» pourrait être utilisé.

La controverse sur le terme de «massacre» a détourné l'attention du fait que des centaines de Palestiniens ont été tués durant l'opération «Bouclier». Malheureusement, le fait que «seulement 52 Palestiniens» furent tués à Jénine a permis à ce rapport de l'ONU de conforter la proclamation israélienne d'innocence et de camoufler les innombrables violations commises par Israël des lois humanitaires internationales.


On peut trouver le rapport de l'ONU sur le site www.un.org/french/peace/jenin/jeninf.pdf

 

LAW* répond aux carences du rapport de Kofi Annan, 1er août 2002

LAW* (The Palestinan Society for the Protection of the Human Rights) est une ONG affiliée à la Commission internationale des juristes, à la Fédération internationale des droits de l'homme et l'Organisation mondiale contre la torture


Répondant à la requête de l'Assemblée générale des Nations unies, le secrétaire général Kofi Annan a publié, aujourd'hui, un rapport sur les événements ayant trait aux incursions militaires d'Israël, au début de cette année, dans la ville de Jénine et dans d'autres villes palestiniennes sises en Cisjordanie. Malheureusement, ce rapport déconcertant ne fournit pas le contexte d'ensemble, ne prend pas en compte l'ensemble des villes palestiniennes, omet des informations des informations vitales et ne donne pas des conclusions raisonnables et des recommandations sensées. LAW considère que l'ONU n'a pas rempli ses obligations visant à juger et circonscrire de façon adéquate les faits à partir de toutes les preuves à disposition, et, à partir de là, à proposer des recommandations judicieuses. Le rapport fournit une légitimité truquée aux affirmations d'Israël selon lesquelles ses actions militaires n'étaient que des actes d'«autodéfense» visant à «détruire les infrastructures terroristes palestiniennes». Le rapport de Kofi Annan aboutit à cela en ignorant le contexte, plus précisément en ignorant «l'occupation illégale» par Israël, un terme que pourtant Kofi Annan lui-même avait utilisé le 12 mars 2002 en faisant référence aux bases illégales de l'occupation amenant Israël à une politique accrue d'annexion et à une politique de colonisation accrue. Les initiatives militaires d'Israël ont, au contraire, renforcer les desseins annexionnistes, comme le prouve tout récemment la réoccupation de la totalité de la Cisjordanie et de la bande de Gaza.

De plus, le rapport fait usage du terme «terrorisme» et «terroriste» sans le définir et seulement en faisant référence à des actes commis par des Palestiniens. Par contre, il ne prend pas en compte les actes commis par l'Etat israélien qui visent à répandre la terreur parmi la population palestinienne, ce qui relève d'un terrorisme d'Etat.

Malgré le grand nombre de preuves apportées au Secrétariat général de l'ONU et malgré les conclusions de très nombreuses organisations internationales, le rapport se refuse à conclure que Israël a commis de graves violations de la IVe Convention de Genève ou des crimes de guerre, même si le rapport cite des «allégations» concernant des crimes illégaux, l'utilisation de boucliers humains, l'usage disproportionné de la force, des arrestations arbitraires, la torture et le refus d'accès à des soins médicaux.

Un rapport de Human Right Watch, datant de mai 2002, conclut: «Les forces israéliennes ont commis de sérieuses violations du droit humanitaire international, dont certaines relèvent de crimes de guerre.» Un récent rapport d'Amnesty International (juillet 2002) fait référence à de graves violations de la IVe Convention de Genève, c'est-à-dire des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité.

Le rapport était censé couvrir ce qui s'était passé à Jénine et dans d'autres villes palestiniennes importantes. Néanmoins, l'essentiel du rapport traite seulement de ce qui s'est passé à Jénine, avec des références tout à faire réduites à ce qui s'est produit à Naplouse, Ramallah et Bethléem. Il ne fait absolument pas une analyse de ce qui s'est passé à Hébron, Tulkarem, Kalkalya, Jérusalem-Est et la bande de Gaza. LAW, le centre pour la défense des droits de l'homme à Gaza, avait fourni à Kofi Annan un rapport résumant les violations commises dans ces diverses villes.

LAW veut examiner un certain nombre des conclusions du rapport. Par exemple, bien que le rapport fasse référence aux attaques contre les infrastructures civiles de l'Autorité palestinienne et «les cibles militaires», il ignore complètement les preuves qui ont été fournies d'attaques délibérées de bureaux d'ONG, y compris d'ONG consacrées à la défense des droits de l'homme, d'infrastructures d'information, de bâtiments civils dans des régions situées hors des zones d'affrontement et de la destruction physique, délibérée, d'infrastructures telles que les réseaux d'eau, l'électricité ou les téléphones. Tout cela dément les propos d'Israël selon lesquels il ne cherchait qu'à «détruire les bases terroristes».

Le rapport fait référence aux affirmations d'Israël selon lesquelles environ 11000 habitants du camp de réfugiés de Jénine eurent la permission de «partir volontairement», alors que l'armée israélienne avait préalablement encerclé le camp. Toutefois, Kofi Annan avait été informé par LAW et d'autres organismes que le gouvernement israélien avait reconnu lui-même, à l'occasion de sa réponse à la Haute Cour suite à trois interpellations faites par LAW et d'autres à cet organisme de justice (HC 3114/02, 3115/02, 3116/02) - interpellations concernant la levée de cadavres du camp de Jénine - que «jusque dans la soirée du 7 avril 2002 quasiment personne n'avait quitté le camp et qu'alors environ une centaine de personnes l'avaient quitté». Ainsi, selon ce qu'admettait lui-même  l'Etat israélien, la vaste majorité des résidents étaient restés dans le camp de réfugiés de Jénine au cours des attaques aériennes et terrestres et des bombardements effectués lors des premiers jours de l'invasion.

En outre, le rapport semble accepter les nombreuses affirmations faites par Israël - affirmations qui n'ont pas été confirmées par des experts militaires indépendants, selon tout ce que LAW a comme information - selon lesquelles des groupes palestiniens «auraient largement piégé avec des bombes les maisons civiles» et «dispersé des mines explosives» (telles que les définissent les experts militaires).

Le rapport ne tient en aucune mesure compte de recommandations - telles que faites par LAW et beaucoup d'autres organismes - qui semblent tout à fait essentielles pour déterminer avec exactitude ce qui s'est produit dans le camp de réfugiés de Jénine. Parmi ces recommandations, il faut mentionner le déploiement d'une équipe de l'ONU pour assister les organismes existant en Cisjordanie afin de conduire une enquête effective indépendante, documentée, enquête qui se fasse avant que les corps soient enlevés des décombres du camp de Jénine, enquête qui vise à retrouver toutes les familles et tous les individus qui étaient enregistrés dans le camp de Jénine, dans la ville et dans les villages avoisinants afin de s'assurer que toutes les personnes ont été prises en compte.

Un manque très important du rapport de l'ONU réside dans l'inexistence de toute mesure concrète proposée afin d'assurer le respect de la IVe Convention de Genève, ce qui pourrait prévenir une détérioration accrue de la situation des droits de la personne humaine dans les territoires palestiniens occupés. Dans ses observations, le rapport ne fait aucune référence à l'absence d'une force multinationale de protection qui aurait pu sauver des vies et qui pourrait toujours sauver des vies de civils dans les territoires palestiniens occupés. [...]

Haut de page

Retour


case postale 120, 1000 Lausanne 20
fax +4121 621 89 88
Pour commander des exemplaires d'archive:

Soutien: ccp 10-25669-5

Si vous avez des commentaires, des réactions,
des sujets ou des articles à proposer: