La libre circulation… des charters
 
 

Immigrés clandestins

L’Europe va «mutualiser» ses expulsions par charters

Par la grâce de la "libre circulation" en vigueur avec les 15 anciens pays de l'Union Européenne, l'augmentation de l'immigration en provenance de l'espace européen a été «contrebalancée par une diminution de l'immigration en provenance des pays classés "Etats tiers". Ce rééquilibrage est conforme aux objectifs de la politique migratoire du Conseil fédéral. » (p. 3 du Rapport de l'Observatoire sur la libre circulation des personnes). La politique des deux cercles, que d'aucuns avaient qualifiée de raciste, contribution helvétique à la construction de l'Europe forteresse, se met ainsi en place, en attendant des jours encore meilleurs avec l'extension aux dix mouveaux membres de l'UE… si le OUI passe le 25 septembre. Nul doute que des escales à Kloten ou Cointin se négocient… dans le cadre de la libre circulation des charters (AG).

Les ministres de l’Intérieur des cinq principaux pays de l’Union européenne -France, Italie, Espagne, Grande-Bretagne et Allemagne- réunis à Évian dans le cadre du «G5» sur la sécurité, ont décidé de mettre en commun leurs expulsions d’immigrés clandestins, en particulier en affrétant conjointement des charters qui feront le tour des capitales européennes pour regrouper les clandestins d’un même pays…

C’est le ministre espagnol de l’Intérieur, le socialiste José Antonio Alonso, qui a fait cette proposition, dictée d’après lui par des considérations techniques. Et Sarkozy a évidemment approuvé cette mesure: «Ces reconduites aux frontières sont des procédures lourdes, nous avons donc décidé de les faire ensemble».

En fait, cette pratique n’est pas une nouveauté, puisque dans le passé, la France, lors du premier passage de Sarkozy au ministère de l’Intérieur, avait affrété des avions en commun, en coopération parfois avec l’Espagne, parfois avec la Grande-Bretagne. Mais les ministres du G5 ont décidé de franchir un grand pas en passant du système d’accords bilatéraux à une politique commune. Le Figaro se félicitait de cet accord: «Les vols en commun incarnent une nouvelle politique européenne».

Et pour enfoncer le clou de cette Europe en marche, les ministres de l’Intérieur du G5 ont décidé de sanctionner les pays qui ne jouent pas le jeu dans ces rapatriements forcés. Avec pour sanction... la diminution du nombre des visas accordés par ces cinq pays européens. Ainsi les ressortissants du Cameroun, de l’Inde, du Pakistan, du Maroc, de la Tunisie, de la Côte-d’Ivoire et du Congo, désirant venir en Europe pour voir leurs familles en tant que touristes, risquent d’avoir encore plus de difficultés à obtenir leur visa. Et elles étaient déjà bien difficilement surmontables.

L’Europe en marche augmente la hauteur de ses barbelés.

Bertrand GORDES (Lutte ouvrière)