Vote du 25 septembre 2005
 
 


Dans le cadre de "l'union sacrée" pour le OUI, la presse ne se bouscule guère pour donner la parole aux partisans du vote NON le 25 septembre, pour une vraie libre circulation et contre la sous-enchère salariale et sociale. Le moulin à prière du OUI, les rengaines de l'UDC et récemment la position qui se veut sans doute démagogique de l'Alliance de gauche de Genève occupent la place. Raison de plus pour relever les exceptions. L'article ci-dessous est paru dans 24 heures du jeudi 25 août 2005, rubrique "Opinions".


Pour la défense de tous les salariés

Charles-André Udry, économiste, Mouvement pour le socialisme

1. Le 25 septembre, deux objets — réunis en un «paquet» — seront soumis au vote: a) un accord avec l’Union européenne pour l’extension de la libre circulation aux salariés des 10 nouveaux pays de l’UE; b) des dispositions («mesures d’accompagnement») prises par les Chambres fédérales, censées assurer la protection des salariés contre la sous-enchère salariale et sociale. Nous prônons le non, car ces mesures de protection ne sont pas efficaces.

2. Un non débouchera sur un moratoire concernant la libre circulation étendue entre la Suisse et l’UE des Vingt-Cinq. Une seconde votation devra alors être organisée, «avec des mesures d’accompagnement plus dures», selon la formule de Peter Bodenmann (Blick, 6 juillet 2005).

3. Les intérêts mutuels entre la Suisse et les leaders de l’UE sont trop grands pour que l’UE dénonce de suite les accords déjà souscrits. Le refrain de l’«effet guillotine» relève du chantage antidémocratique.

4. Les milieux économiques veulent l’adoption des accords bilatéraux. Les gains sont trop importants pour eux. Ainsi, le président de l’Union patronale, R. Stämpfli, déclare: «Sans l’engagement des syndicats… cette votation ne sera jamais gagnée.» Son directeur, P. Hasler, dit que ces mesures ne coûteront rien aux employeurs, mais que l’appui syndical est nécessaire (Schweizer Arbeitgeber, 23.12.04).

Face à ce «besoin» patronal, revendiquer et obtenir de véritables droits pour tous les salariés — suisses et immigrés — est de l’ordre du possible. Des droits plus qu’indispensables car, selon Christoph Blocher, partisan du oui: «Dans certaines branches, comme dans le secteur des banques et des assurances, de l’ingénierie ou dans l’industrie, la pression sur les salaires devra bien s’exercer.» (Tages-Anzeiger, 5 juillet 2005)

5. Ceux en faveur du oui, par une saine opposition aux forces xénophobes, devraient se poser deux questions. Pourquoi 17 conseillers d’Etat UDC sur 19 et les industriels de l’UDC sont-ils en faveur du oui? Pourquoi le conseiller national Philipp Müller (rad., AG), pourfendeur de la «surpopulation étrangère» (promoteur de l’initiative des 18%), est-il un fervent partisan du oui? Parce que les salariés de l’UE à 25 sont plus «suisso-compatibles»! Ce qui rejoint la politique de migration des autorités: de fait, les deux cercles (Rapport de l’Observatoire sur la libre circulation, 28 juin 2005, p. 3).

6. L’USS et le PSS implorent les autorités et le patronat d’appliquer les mesures d’accompagnement contre un dumping avéré. Les délégués du PSS signalent: «Nous ne voyons pas de réelle volonté (des cantons et du patronat) de les mettre en œuvre.» (25 juin 2005). Ce seul constat ne milite-t-il pas en faveur du non?

7. Sans protection contre les licenciements, il n’y aura pas de frein à la sous-enchère. Qui se risquera à informer des commissions de contrôle tripartites? Or, ces dernières reconnaissent la difficulté d’obtenir des informations crédibles (Le Temps, 17 août 2005). 60% des salariés ne disposent pas de convention collective (CCT). Celles existant doivent être valables pour tous les salariés de la branche sur demande des seuls syndicats. Là où n’existe aucune CCT, un salaire minimal et un horaire maximal doivent être fixés par l’autorité. Les employeurs doivent annoncer salaires et qualifications de toute nouvelle personne engagée. Sans ces mesures, il n’y aura pas de lutte réelle contre les abus. Un non le 25 septembre ouvrirait la porte à l’introduction de ces droits élémentaires dans notre législation du travail squelettique.