Mesures d'accompagnement au rabais pour la libre circulation des personnes
 
 

Des chiffres et des faits

Alain Gonthier

Le dépôt du référendum de gauche contre le dumping salarial et social a donné lieu à divers commentaires dont le point commun est de se focaliser sur le nombre de signatures sans aborder le fond des problèmes posés. Un mention particulière doit être faite pour le « Supplément électronique genevois au journal solidaritéS », rédigé par le professeur de l'Université de Lausanne Jean Batou, dont on rappellera qu'il a soigneusement perdu la mémoire de ses positions favorables au référendum (voir http://www.indymedia.ch/fr/2005/01/29240.shtml), ce qui le qualifie évidemment tout particulièrement pour le critiquer. Grapillant dans la presse quelques chiffres, il en conclut que notre référendum était « un bluff ».

Tant qu'à parler chiffres, autant qu'ils soient exacts

Ce serait pour commencer le minimum d'exigence scientifique ou simplement journalistique que de se renseigner sur les chiffres exacts, accessibles sans problème auprès de la Chancellerie fédérale. Les voici: Signatures déposées par divers comités de la droite extrême: 77'380; par l'Alliance de gauche de Genève: 2398; par le comité contre le dumping salarial et social: 6986. Total des signatures récoltées par des organisations se situant à gauche 9384. Total global des signatures 86'764. Les signatures récoltées par des organisations de gauche représentent donc 11% du total.

Facile de convaincre par la discussion directe

Il aurait été évidemment souhaitable que cette proportion soit plus grande. Pourtant celles et ceux qui ont récoltées des signatures dans les conditions hivernales peuvent témoigner que la population manifestait une grande disponibilité à signer. Le principal obstacle n’était pas le fond du problème, car chacun ou chacune connaît des exemples où le dumping salarial est utilisé par les patrons, mais bien le réflexe simpliste anti-Blocher, qui fait dire OUI quand Blocher dit NON. Les militants s’affichaient clairement de gauche, et défendaientt la nécessité de refuser le faux dilemme « avec Blocher ?, ou avec Hasler, patron des patrons ? » en répondant « avec les salarié·e·s, pour leurs droits sociaux et syndicaux ». Dans une discussion directe, cette argumentation remportait assez facilement l’adhésion.

Un « peuple de gauche » désécurisé

Par contre, la propagande contre le référendum de la part de la majeure partie de la gauche, y compris celle qui se croit extrême, relayée par une série d’articles de presse, a eu un impact parmi les « gens de gauche ». Peu certains de savoir qui avait raison, ils se sont abstenus, ce qui explique le peu de signatures « spontanées » recueillies, mais ne présume en rien de leur avis sur la situation sociale, sur la nécessité de combattre le dumping salarial, et encore moins de leur vote en septembre 2005.

Impact populaire de l'extrême-droite et responsabilité des organisations majoritaires de la gauche

L’extrême droite en déposant ses signatures n’a pas manqué de signaler que « le profil des signataires n’était pas seulement national conservateur, mais aussi syndicaliste ». Il faut bien sûr faire la part de la propagande. Mais il est certain qu’il y a une part de vérité: cela indique, d’une part, que tous les signataires sur des formulaires d’extrême droite ne peuvent être assimilés à ce courant, mais aussi, plus important, que ce référendum, vu la position de la large majorité de la gauche organisée, a permis à l’extrême droite de se profiler sur le terrain social de la gauche. Cela ne fait que souligner la responsabilité de ces organisations.

Et maintenant ? Une campagne de longue haleine

Si le référendum avait été un coup de bluff, le dépôt des signatures en aurait sifflé la fin. Mais tel n’est pas le cas. Le référendum n’est pour nous que la première phase d’une longue campagne, la deuxième phase préparant la votation du 25 septembre, et la troisième, après un NON, visant à obtenir une renégociation, avec les autorités suisses, de vraies mesures d’accompagnement (voir communiqué MPS-BFS - Alliance de gauche).

Un débat inévitable. Y participer du côté des patrons ? ou du côté des salarié·e·s ?

Dès la décision du Parlement, il était certain que le débat et le vote sur la (pseudo) libre circulation et les (soi-disant) mesures d’accompagnement aurait lieu (quand l’extrême droite a-t-elle pour la dernière fois raté un référendum ?). Dès lors, la question ne pouvait pas être « d’aider ou de ne pas aider Blocher », comme a feint de le croire la plus grande partie de la gauche. L’enjeu était de tout faire pour modifier les axes et le déroulement d’un débat inévitable et d’empêcher qu’il se résume à un face à face entre d’une part le soi-disant « bloc ouvert » allant « d’A gauche toute » à Peter Hasler patron des patrons en passant par les directions syndicales, socialistes et vertes, et d’autre part l’UDC. Celle-ci aurait alors pu apparaître comme seul défenseur des salarié·e·s qui, dans la réalité, vivent et vivront les effets du dumping salarial et social. Que des enquêtes de circonstance (voir sur ce site la critique de l'enquête du Seco) les nient, que des fonctionnaires syndicaux dans leurs bureaux bernois refusent de les enregistrer, ne changera rien aux faits.

Ces faits, ces cas de dumping au profit des patrons, nous les recueillerons, les recenserons, les présenterons avec leur arrière-plan, dans une vraie campagne de gauche, massive, pour une libre circulation acompagnée de droits sociaux et syndicaux renforcés. Pas de bluff, mais de l’opiniâtreté et de la conviction dans la défense de toutes celles et tous ceux qui travaillent et travailleront en Suisse.

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