Mesures d'accompagnement au rabais pour la libre circulation des personnes
 
 

Du radicalisme à prétention universaliste à l’impuissance

Alain Gonthier *

La politique suisse n’est pas, c’est le moins qu’on puisse dire, encombrée de débats de fond. Aussi quand on apprend que le président en exercice du syndicat comedia s’est donné la peine de répondre à la brochure du MPS sur la libre circulation et les mesures d’accompagnement, le premier mouvement est de s’en féliciter, et d’y aller voir avec intérêt.
Il faut malheureusement vite déchanter: le long texte de Christian Tirefort – plus long et plus « difficile à déchiffrer » que celui qu’il prétend analyser et introduire – nous en apprend plus sur l’image qu’il s’est forgée de la brochure du MPS que sur son contenu réel. Au-delà, Christian Tirefort y développe une vision du système capitaliste qui, si elle était prise au sérieux et transformée en orientation, achèverait de dissoudre ce qui reste du mouvement syndical en Suisse.
Approfondissons un peu

L’insulte comme argument publicitaire ?

Ça commence mal ! L’accroche sur le site de comedia est titrée « Un référendum à connotation raciste “de gauche” est-il possible ? » En bon français, le référendum de gauche est ainsi qualifié de raciste. Est-ce cela le signe d’une volonté de débat honnête ? Faut-il vraiment continuer à lire ? Cette « radicalisation » publicitaire du titre du document – que l’on découvre à la page suivante sans le terme « raciste » est en tout cas plus un signe d’adaptation à la marchandisation du monde, que d’un progrès dans la conception du débat démocratique.

Les droits de l’Homme sont universels et indissociables

« La libre circulation est à classer parmi les droits humains universels » nous dit Christian Tirefort. Juste, évidemment. Mais alors comment justifier de réduire cette universalité à la seule Union Européenne ? Dès lors qu’on fait, comme CT, du respect de ce droit un absolu, le problème mériterait au moins d’être posé ! En outre, la Déclaration universelle des droits de l’homme proclame, au-delà des dites libertés formelles et sans hiérarchisation, une série de droits « sociaux » (articles 22 à 27). La libre circulation, sans assurance conjointe que ces autres droits sont respectés, n’est que l'obligation faite à des « bras » taillables et corvéables à merci de suivre les besoins du capital, l’acceptation que, comme CT le dit plus loin [ 1] « on est dans une société où le travail doit suivre le capital là où il va. ». Oubliez le droit de « vivre et de travailler au pays », oubliez la défense d’un développement équilibré, les Polonais exerceront leur prétendu « droit à la libre circulation » en abandonnant leurs attaches, leur famille, leur culture, tout sera pour le mieux dans le meilleur des mondes objectivement constaté par Chistian Tirefort…

De l’art de la non-citation…

Pour analyser le chauvinisme (point 2), notre critique se plonge dans un article de la Tribune de Genève, bien connue comme la meilleure source documentaire concernant le mouvement ouvrier. Et y pêche des citations de Lucien Tronchet de la FOBB en 1961 (et plus bas d’un secrétaire de la FCTA), pour diagnostiquer « qu’une partie de l’extrême-gauche reprend les mêmes thèmes [que Tronchet], mot pour mot » et que « le MPS, comme Lucien Tronchet, réclame “une pause” [à l’afflux d’étrangers] ». Le strict minimum d’honnêteté voudrait que ce « mot pour mot » soit prouvé, que ce terme de « pause » soit mis en évidence. Idem en ce qui concerne l’affirmation que « Le MPS essaie de résoudre ce problème en se retranchant dans son réduit national ». Christian Tirefort est d’ailleurs bien conscient de cette exigence, puisque, ironiquement, il écrit plus bas [1]: « C’est évidemment très sérieux de prétendre que quelqu’un pense une chose, de citer une source, sans être capable de citer le moindre passage étayant ce qui est prétendu ». Et pourtant, pas la moindre référence à l’appui de ses graves accusations ! Pourquoi ? Tout simplement, parce que dans toute la brochure, il est impossible de trouver un seul passage pouvant les confirmer. Bien au contraire, le lecteur honnête, même peu attentif, même peu zélé, trouvera facilement de quoi les démentir: la brochure commence en première page par le slogan « Pour une libre circulation des salarié·e·s adossée à de véritables droits sociaux et syndicaux ! » et se conclut par une série de revendications dont pas une n’évoque, même de très loin, une pause, ou une fermeture nationale !

… et de la citation déformée

Cela n’empêche pas CT de pratiquer quelques péchés plus « véniels » ; surinterprétation et déformation. Quelques exemples:
• où la brochure dit « une mise en concurrence planifiée par le patronat », CT fait mine de comprendre « ainsi le patronat planifie tout », puis polémique contre sa propre affirmation grotesque ;
• où la brochure dit « le “paquet” proposé […] aboutit à fragmenter, encore plus, les collectifs de travailleurs, » CT ironise à faux « si au moins c’était le « paquet » qui aboutissait à cette division ! » ;
• de « la compétitivité en termes de prix de vente plus bas n’est pas prioritaire pour l’essentiel de l’industrie suisse ». CT fait « Les « prix de vente » ne joueraient pas de rôle pour le “capitalisme suisse” » ;
• la note de la page 3 de la brochure « Par respect pour les salarié·e·s nous avons choisi de développer ici une argumentation assez complète et d’échapper à la propagande de type soviétique et publicitaire », tripatouillée par CT devient: « Notre argumentaire part d’une analyse complète », ce qui lui « permet » de polémiquer contre des fantômes du style « on a réfléchi pour vous, signez » ;
• quand la brochure examine la réalité de l’économie suisse, ses points forts, ce qui fait – pour dire simplement les choses – que malgré les différences de salaires et les dynamiques objectives du système, il existe encore des entreprises en Suisse, CT y voit l’affirmation que « le capitalisme suisse serait protégé », ce qui « mène évidemment [cette évidence étant spécifiquement tirefortienne] à l’idée que les travailleurs n’ont pas à avoir peur de la concurrence internationale entre capitalistes, mais par contre qu’ils doivent craindre celle de leurs congénères des autres pays qui viendront prendre leur travail à vil prix. »

Critique ? Ou œuvre de fiction ?

On pourrait poursuivre l’exercice [2], mais il serait vain. Consciemment – ou ce qui serait pire, inconsciemment – Christian Tirefort a inventé « un fil conducteur qui place le MPS parmi les organisations croyant encore possible de développer une “alternative” au capitalisme à l’intérieur de l’Etat / Nation traditionnel. » (cf. accroche sur le site de comedia). Il s’est forgé l’image d’un MPS « croyant possible de faire tourner la roue de l’histoire à l’envers » (idem), « se retranchant dans son réduit national » (pt. 2), pensant « que des solutions administratives ou des lois décidées d’en haut, freinant l’afflux de travailleurs étrangers sous le prétexte de lutte contre le dumping salarial, créeront les conditions d’une contre offensive des travailleurs » (pt. 6) et dont la stratégie serait « d’offrir de se barricader dans ses frontières nationales et empêcher ainsi l’accès à des meilleurs emplois pour les travailleurs les plus fragilisés ». Armé de cette image de l’adversaire, il est parti à l’assaut, tordant le contenu et le sens de la brochure tant qu’il fallait pour la faire rentrer dans son moule, ou dénonçant des contradictions quand il n’y parvenait pas. Cette forme de polémique est évidemment plus facile que de considérer ce qui est écrit, d’essayer de le comprendre avant de le critiquer: Y a-t-il en effet argument plus facile à réfuter que celui qu’on a soi-même imaginé à cet effet ? Ce mépris pour la réalité du texte se double d’ailleurs d’un mépris de la réalité tout court: pas un chiffre, pas une analyse concrète n’est avancé pour réfuter l’un ou l’autre de nos arguments.

Un capitalisme totalement globalisé…

Si ce n’était que cela, on pourrait s’arrêter là, et dire « tant pis et à la prochaine ». Mais la logorrhée de CT, si elle ne dit pas grand-chose sur la brochure du MPS, met au grand jour sa vision du monde, qui ne laisse pas d’inquiéter.

Au début est une description d’un capitalisme dont la globalisation serait totalement achevée: « Chers auteurs de ce torchon [apprécions la caresse au passage], ce n’est pas si simple. Aujourd’hui “les employeurs organisés” ne sont pas aussi homogènes que décrits. Ils n’existent que comme gestionnaire des objets de spéculation des actionnaires, donc plus comme “patrons” », Ou encore: « La notion de “capitalisme suisse” est complètement inadéquate. En réalité, aujourd’hui, le capital circule dans le monde entier, il n’est plus du tout attaché à une nation. Il est mondialisé. Il s’est « désempêtré » des règles nationales, et il a réussi parce que, par définition, le capital n’a pas de frontière. » Et plus loin « On [le MPS] oublie, ou plutôt nie le fait que le capital s’est détaché de son existence concrète, il n’existe que pour et par lui. Les firmes sont tout au plus des objets de spéculation d’un capital de plus en plus dévorant. »

… un cadre national obsolète, des revendications concrètes dépassées…

De là découle pour CT que les lois et les revendications concrètes sont obsolètes, parce que se conformant au cadre national dépassé. D’ailleurs, la partie revendicative de notre brochure n’a pas été jugée digne d’une ligne d’attention. « Cela [la notion de capitalisme suisse] n’est pas neutre parce que cela mène à la notion de travailleurs suisses, qui doivent exiger que le capital suisse profite aux travailleurs en Suisse, donc qui doivent “se protéger par des lois” contre les risques de dumping de la main-d’œuvre étrangère, en particulier lorsque celle-ci est trop pauvre. » Et: « Maintenant, passons à la notion « revendications concrètes ». Dans toute société ce qui est concret est ce qui est compatible avec cette société. Autrement ce n’est pas concret, c’est taxé d’utopie parce que non compatible. Il y a 100 ans que le mouvement ouvrier fait des « revendications concrètes ». Celles-ci ont servi à aménager le capitalisme, ce qui lui a permis de faire deux guerres qui furent des carnages planétaires, et l’amène à réussir l’exploit d’appauvrir le monde entier alors que la capacité de créer de la richesse n’a jamais été aussi grande. Alors restons concret ! » 

… et des capitalistes disparus

Par ailleurs, nous dit CT, « Il y a dans ce texte [la brochure du MPS] un refus de voir la mondialisation telle qu’elle est, ou alors elle est présentée comme un projet d’une caste de capitalistes tirant les ficelles comme s’ils n’étaient pas eux-mêmes finalement “victimes” du système. » (cf. introduction sur le site de comedia). Il critique violemment (juste après le dernier sous-titre « Quelques repères… ») la notion de « mise en concurrence planifiée par le patronat » pour nous révéler que « Le “patronat” n’existe plus en tant qu’entité uniforme » (comme s’il l’avait été, uniforme). Mais cela va au-delà: « le capital s’est détaché “de son existence concrète” », il n’y a plus de patronat tout court. Et rien n’est « planifié »: « aujourd’hui [le patronat] réagit plus qu’il n’agit vis-à-vis du capital ». CT dissout ainsi la classe capitaliste et place les salarié·e·s face à une entité abstraite, mondialisée, fluctuante, désincarnée, pour tout dire inatteignable: le capital.

Une analyse fausse: les formes étatiques sont bien présentes…

Cette analyse de la société capitaliste ne rend pas compte de la réalité.

Les bases étatiques, nationales ou inter-nationales (de l’UE à des accords comme l’ALENA qui ont une forte base légale), sont encore loin d’avoir été abandonnées par le Capital, plus exactement par le Capital sous sa forme de capitaux particuliers, qui est la seule forme concrète d’existence du Capital en général. Ces capitaux particuliers, ce sont des entreprises, des firmes nationales ou transnationales, industrielles, de services ou financières, souvent réunies sous la houlette de holdings. Elles ont toutes une base privilégiée dans un Etat national. Dans leur développement, elles cherchent, parfois, à acquérir des appuis directs forts dans deux ou trois Etats nationaux (par exemple: Renault-Nissan: France et Japon ou GM-Opel-Saab: Etat-Unis, Allemagne, Suède ; Airbus: France, Allemagne, Italie, Espagne etc. face à Boeing: Etats-Unis).

A cela s’ajoutent les accords bilatéraux et multilatéraux entre Etats, accords qui sont largement dictés par les organisations collectives des grandes firmes, comme le montre bien le travail desdits groupes de pression dans l’UE, que ce soit dans le domaine alimentaire, de la pharma, des normes de qualité (ISO 9000 et IS0-9001), de l'organisation de la téléphonie ou des transports, etc.

Enfin – et ce n’est pas le moins important, de très loin –, on pourrait ajouter ce qui est au centre de nombreux débats publics aujourd’hui: les affrontements entre monnaies nationales à propos de leur taux de change effectifs (yen-dollar, dollar-euro, franc suisse-euro, livre sterling euro, ou, plus récemment le yuan-dollar-euro) et aussi de leurs rapports comme monnaie de référence à des produits comme le pétrole ou le blé ; sans même parler de la gestion de la masse monétaire en lien avec les déficits des Etats nationaux. Dans ces affrontements les Etats nationaux et leurs Banques centrales jouent un rôle décisif. La gestion de la monnaie, si importante dans le circuit du Capital, reste le domaine privilégié de l’Etat national ou d’un proto-Etat en formation (l’UE et sa banque centrale: la BCE). Sans cet instrument, il n’y a pas d’expansion du capitalisme sous sa forme concrète de concurrence entre capitaux particuliers et donc de contradictions interimpérialistes (dont les modalités changent certes au cours de l’histoire). CT pourrait y réfléchir. Cela lui serait profitable, quitte à l’être pour d’autres.

Mais peut-être CT est-il seul contre le reste du monde à avoir découvert: que les capitalistes européens ne s’efforcent pas de construire leur proto-Etat supranational ; que le capitalisme mondial se passe très bien de l’appareil d’Etat US, et en particulier de son armée ; et que c’est pour rire que les capitalistes suisses s’associent avec passablement de moyens sous le nom d’economiesuisse…

… et les capitalistes agissent, mènent la lutte des classes

Sans évidemment tout maîtriser (planifier ne veut pas dire contrôler jusqu’au dernier boulon, c’en était la version stalinienne), et non sans contradictions entre eux, les capitalistes – plus exactement leurs fractions hégémoniques – font tout pour que l’évolution de la société soit conforme à leurs intérêts particuliers et collectifs, une dialectique bien saisie par Marx dans l’analyse des différentes phases de la reproduction du Capital. Dans la guerre internationale des classes, ils ont des « états-majors », planifient des offensives, et, en ce moment, les réussissent plutôt bien.

Mais Christian Tirefort va certainement nous révéler que c’est l’esprit du Capital qui, il y a dix ans a dicté le « Livre blanc », qu’à Davos ne se réunissent que des skieurs, que la table ronde des industriels européens est une sorte de confrérie du Guillon, et que les séances de l’OMC… sont encore un mensonge du MPS. Il faudra proposer aux prochains Forums sociaux d’arrêter des manifestations sans objet…

Conclusion: à bas le syndicalisme ?

Plus grave, l’orientation qui découle de cette analyse est mortelle pour le mouvement syndical, ce qui venant de la part d’un président de syndicat – certes bientôt retraité – est plutôt inquiétant: Quelle loi (sur le travail par exemple), quel règlement (sur l’ouverture des magasins, au niveau communal, vous imaginez !), quelle CCT, quelle lutte d’entreprise pour une revendication concrète, au mieux nationale, pourrait bien échapper à la furie universaliste abstraite de Christian Tirefort ? Quel champ d’action peut bien avoir un sens pour des salarié·e·s associés dans un syndicat ? Si CT, ou ses successeurs à la tête de comedia, prenait au sérieux ce qu’il écrit, il ne leur resterait guère qu’à fermer boutique. Et on se demande bien pourquoi la gauche radicale française et y compris la gauche social-démocrate se battent pour le Non à la Constitution européenne. Là aussi, un déficit d’information doit exister: ils n’ont pas eu la révélation qu’infuse et diffuse le texte de CT. Il devrait tirer au-delà de la province suisse française.

Mais, l’impuissance théorisée peut-elle aller longtemps sans conséquences pratiques ? On sait que Christian Tirefort avait manifesté un enthousiasme tempéré pour les deux dernières grèves importantes dans le secteur des arts graphiques, Allpack et Filtrona. A posteriori, cela n’a-t-il rien à voir avec son analyse générale ? Vouloir maintenir des acquis, refuser des baisses de salaire, quel manque de vision d’ensemble ! Prétendre continuer de travailler à Crissier et refuser le déménagement de machines à l’étranger, quel localisme et quel chauvinisme…

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* membre de comedia et du MPS

1. Au-delà du point 14, il n’y a plus de points de repères, et il devient difficile de préciser la source des citations.

2. On ne résiste pourtant pas à mettre en évidence encore deux passages du texte de CT.

• Dans le premier, il pontifie, et corrige les « erreurs théoriques » de la brochure du MPS: « Dans le capitalisme la productivité n’est plus liée au travail mais au capital. Elle vient remplacer le mot rentabilité. Ainsi, pour donner une charge positive au capital et l’enlever au travail, on a substitué la notion de productivité du travail par celle de productivité du capital. Selon cela un travail n’est productif que s’il fait le capital productif, donc rentable, autrement il est un « coût » jugé insupportable. » Et pourtant, productivité et rentabilité restent malgré CT deux choses distinctes. Que l’on pense à une unité de production de sorbets sur la banquise, dont la productvité serait à coup sûr élevée, mais la rentabilité douteuse, eu égard à la densité de clientèle potentielle… Ou plus sérieusement au choix auquel est confronté tout imprimeur (ou coopérative d’impression): la vieille Heidelberg (ou Roland), bien entretenue, en bon état de marche, mais sans aucun automatisme, est rentable, puisque largement amortie comme la chaîne de production en amont, bien que ne permettant qu’une productivité faible. L’achat d’une machine neuve, avec tous les automatismes de rigueur, permettra un gain de productivité incontestable. Mais, compte tenu du coût de cet achat (ou des frais du leasing), cette décision sera-t-elle rentable ? Les deux choses son bien distinctes. Christian Tirefort aurait dû retourner à l’atelier, c’est un peu tard maintenant…

• Dans le deuxième, il se fâche tout rouge, et sur quelque 2 pages, contre la note 13 de la brochure (17 petites lignes). « Mais il y a un point encore plus hypocrite et crasseux dans ce texte. Il indique “la valeur de la force de travail est constituée par l’ensemble des dépenses nécessaires pour sa production [souligné par CT] et reproduction”. A une notion juste si on la replace dans son contexte capitaliste “la valeur de la force de travail est constituée par l’ensemble des dépenses nécessaires pour sa reproduction”, les auteurs du texte glissent une notion supplémentaire, celle de “production de la force de travail”. C’est une vraie saloperie qui laisse entendre que la production de la force de travail, c’est-à-dire l’ensemble du processus de procréation, serait entré dans la valeur de la force de travail. C’est ignorer complètement l’ensemble du travail gratuit fourni par les femmes, à propos duquel une vaste polémique est orchestrée par l’ensemble de la droite et de l’extrême-droite. A moins que le MPS n’estime que la misérable assurance maternité qui a mis plus de 50 ans à accoucher, est la reconnaissance du constituant “production de la force de travail” dans la valeur de la force de travail en Suisse ? » On comparera avec la citation suivante (un peu longue, mais certains développements pourraient être confrontés utilement à d’autres passages voisins de CT): « Quels sont les frais de production de la force de travail elle-même ? Ce sont les frais qui sont nécessaires pour conserver l’ouvrier en tant qu’ouvrier et pour en faire un ouvrier. Aussi, moins un travail exige de temps de formation professionnelle, moins les frais de production de l’ouvrier sont grands et plus le prix de son travail, son salaire, est bas. Dans les branches d’industrie où l’on n’exige presque pas d’apprentissage et où la simple existence matérielle de l’ouvrier suffit, les frais de production qui sont nécessaires à ce dernier se bornent presque uniquement aux marchandises indispensables à l’entretien de sa vie, de manière à lui conserver sa capacité de travail. C’est pourquoi le prix de son travail sera déterminé par le prix des moyens de subsistance nécessaires. Cependant, il s’y ajoute encore une autre considération. Le fabricant, qui calcule ses frais de production et d’après ceux-ci le prix des produits, fait entrer en ligne de compte l’usure des instruments de travail. […] Il faut comprendre de la même manière, dans les frais de production de la force de travail simple, les frais de reproduction grâce auxquels l’espèce ouvrière est mise en état de s’accroître et de remplacer les ouvriers usés par de nouveaux. L’usure de l’ouvrier est donc portée en compte de la même façon que l’usure de la machine. Les frais de production de la force de travail simple se composent donc des frais d’existence et de reproduction de l’ouvrier. Le prix de ces frais d’existence et de reproduction constitue le salaire. Le salaire ainsi déterminé s’appelle le minimum de salaire. Ce minimum de salaire, tout comme la détermination du prix des marchandises par les frais de production en général, joue pour l’espèce et non pour l’individu pris isolément. Il y a des ouvriers qui, par millions, ne reçoivent pas assez pour pouvoir exister et se reproduire ; mais le salaire de la classe ouvrière tout entière est, dans les limites de ses oscillations, égal à ce minimum. » Travail salarié et Capital, K. Marx, 1847… soit quelques années avant l’instauration de l’assurance maternité en Suisse, selon la « malicieuse » hypothèse de CT… On savait que nombre de grands marxistes autoproclamés n’avaient jamais lu une ligne de Marx, on en a la confirmation… (www.marxists.org/francais/marx/works/1847/12/km18471230-2.htm)

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