N° 5 2002

Sommaire

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Amérique du Sud.
- L'argentinazo dans le cadre continental (C.-A. Udry)

Ordre impérial et ordre intérieur (II).
- La sécurité des multinationales (P. Gilardi)

Asile et immigration.
- L'utilitarisme migratoire en question (Alain Morice)

- La lutte contre le travail au noir au service de la précarisation

La Suisse, un des laboratoires de l'OCDE.
- Investir dans le «capital humain» (P. Martin)

Réorganisations et concentrations dans l'industrie des médias (II).
- Des géants qui se partagent le monde (J.-F- Marquis)

Suisse-Afrique du Sud (I).
- Une base pour «l'expansionnisme» helvétique (D. Gygax)

Socialisme en débat (I).
- «Qu'est-ce que le socialisme-à-partir-d'en-bas?» (Hal Draper)

A lire.
-
Christian Jacquiau, Les coulisses de la grande distribution - Les Notes de la Fondation Copernic, Egalité sans frontière. Les immigrés ne sont pas une marchandise


Editorial

Deux fois par année, le président du conseil d'administration de la Banque centrale américaine, l'US Federal Reserve Bank, joue les pythies. Ce fut le 27 février.
Alan Greenspan est plus important que le président des Etats-Unis. Wall Street le sait. D'ailleurs la presse économique américaine ne parle-t-elle pas de l'arrivée de «l'ère Greenspan-Bush», après «l'ère Greenspan-Clinton»?
Cette formule est un peu étonnante pour la «première démocratie du monde». Le président de la Banque centrale passe avant le président élu - il est vrai par des moyens assez peu orthodoxes - au suffrage universel.
Mais n'apprend-on pas en lisant les historiens de Rome que la femme de César était au-dessus de tout soupçon parce que Cesar avait décidé qu'elle le soit. César aux Etats-Unis n'est autre que le grand capital financier pour qui Greenspan travaille. Dès lors, il est au-dessus de tout soupçon.
Ainsi, Greenspan peut «convaincre» Clinton qu'il faut supprimer le déficit public et, de la sorte, empêcher que 44 millions d'Américains et d'Américaines ne disposent d'une couverture maladie. Par contre, il peut parler «d'exubérance irrationnelle» de la Bourse en 1995 et permettre, malgré tout, que les banques et grandes sociétés puissent multiplier les opérations pourries d'endettement.
Lorsque Greenspan parle, il faut déchiffrer ce qu'il veut dire. Néanmoins, une chose est évidente: il doit affirmer que la situation de l'économie est en phase avec ce qu'attendent les marchés! Traduction: les indices boursiers vont se stabiliser; les faillites à la Kmart ou à la Enron ne vont pas se multiplier. Suivez donc les conseillers en placement. Ne pensez plus à l'histoire de Woody Allen: «Que fait un conseiller en placement?» Réponse: «Un conseiller en placement vous dit quelles actions et quelles obligations acheter, jusqu'à ce que vous n'ayez plus d'argent.» Donc, Alan Greenspan doit dire: «Il y aura une relance modérée», afin que banques et autres instituts financiers puissent rassurer les retraité·e·s qui espèrent que les valeurs de leurs fonds de pension ne se contractent pas plus. Il doit rassurer la clientèle.
Certes, Greenspan ne peut trop mentir. Donc il doit faire dans le compliqué. Pourtant, il sait fort bien que la relance, une fois que les stocks seront reconstitués, va être boiteuse. De plus, il a parfaitement connaissance de la situation sombre de l'économie japonaise, de la croissance malade de l'Europe, de la crise rampante des économies anciennement émergentes.
De plus, il sait que, durant les douze derniers mois, l'économie américaine a fonctionné à crédit pour assurer l'achat des biens durables et des maisons. Donc, les maisons et les biens durables (appareil ménager ou voiture) ne vont pas tirer le cycle de relance..Il sera donc modéré. D'autant plus que le chômage, officiellement, se situera à hauteur de 6,25% en 2002.
Et qu'en est-il de l'investissement productif? Les entreprises disposent de capacités de production inutilisées importantes. La concurrence est rude. Elles ne peuvent donc pas tenter de maintenir leurs profits en passant les augmentations de coût sur le consommateur. La relance de l'investissement restera faible. Faire face au service de la dette deviendra un problème plus aigu pour des secteurs entiers (les télécommunications, par exemple).
En plus, le ballon de l'économie américaine ne peut rester gonflé qu'en étant sûr qu'un milliard de dollars arrive tous les jours aux Etats-Unis des quatre coins du monde. Le déploiement militaire américain peut aider à réaliser cette tâche démocratique.
Dans ce contexte, il y a fort à parier que, butant sur la faiblesse de la demande interne et sur la fragilité de beaucoup d'entreprises - la nouvelle économie Enron -, ladite relance modérée pique du nez fin 2002. La récession en «double-dip», sous forme de W, est plus que probable.
Où est donc le modèle américain qui marche si bien et dont on nous a bassinés durant les années 1990? Ce «modèle», pour fonctionner, doit serrer les salariés comme des citrons puis les jeter. Il doit «s'emparer du monde» pour injecter la plus-value ratissée à Wall Street. Mais, paraît-il, la démocratie américaine et le capitalisme hégémonique américain assurent le fonctionnement d'une grande institution démocratique: l'ONU. A voir. - Réd.

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