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WEF 2005

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Donner voix à la colère sociale

Une manifestation nationale contre le World Economic Forum (WEF) et «L’Autre Davos» auront lieu le 22 janvier à Berne. Enjeux, alors que le WEF annonce une politique encore plus dure des dominants. (voir infos sur ce site)

Alessandro Pelizzari

Chaque année, en janvier, les 1000 plus grandes entreprises transnationales et leaders politiques parmi les plus importants se réunissent au World Economic Forum (WEF) de Davos pour «améliorer ensemble l’état du monde». Le WEF permet aux Global Players, pourtant habitués à se livrer des batailles concurrentielles acharnées pour des parts du marché mondial, de discuter des grandes options nécessitant des actions concertées et de lancer des offensives idéologiques communes selon les besoins du jour.

"Prendre des décisions dures"

Les récentes éditions du WEF ont reflété les éléments de remise en cause de la légitimité du capitalisme mondialisé après l’effondrement de la nouvelle économie ainsi que de la nécessité de réconcilier les puissances impérialistes pour faire face à l’enlisement de l’occupation états-unienne en Irak. «Building Trust» (Etablir la confiance) titrait le WEF 2003, «Partnering  for security and prosperity» (Ensemble pour la sécurité et la prospérité) lançait le Forum en 2004, laissant un espace important à la «société civile» (ONGs, ONU, etc.) pour qu’elle intègre la gouvernance globale d’un capitalisme mondialisé dont les coûts sociaux et écologiques de sa propre survie sont de plus en plus lourds à supporter.

Aujourd’hui, le WEF referme cette parenthèse et se présente déterminé à jouer un rôle dans la relance d’un nouveau cycle d’offensives néo-libérales. Sous le mot d’ordre de «Taking Responsibility for Tough Choices» (Prendre la responsabilité de décisions dures), les grands patrons débattront du 26 au 30 janvier à Davos de «tough issues» tels que: «Le Moyen-Orient» et «le leadership des Etats-Unis» (donc le partage de l’Irak après les élections farces du 30 janvier), «l’économie mondiale» et «la pauvreté» (donc l’accélération des réformes visant à détruire ce qui reste encore des systèmes de protection sociale) ou encore «le commerce mondial». Ce dernier sera d’ailleurs sujet d’une conférence ministérielle extraordinaire de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en marge du WEF, visant principalement à débloquer les négociations sur l’agriculture et les services.

Seul le thème du «Open Forum de Davos», coorganisé par le WEF et Pain pour le prochain, donne encore l’apparence de Global leaders soucieux de justice sociale. Mais débattre de «l’éthique dans l’économie» est probablement surtout une manière de faire oublier que le secrétaire général du WEF, José María Figueres, a été licencié avec effet immédiat en novembre dernier suite à une affaire de corruption au Costa Rica…

Le mouvement Anti-WEF

Au-delà de la grande messe médiatique des puissants de ce monde, le projet de domination du monde que le WEF représente se traduit surtout par un quotidien inacceptable pour une vaste majorité d’hommes et de femmes, marqué par le démantèlement de leurs droits sociaux et démocratiques, la dégradation de leurs conditions de travail, ainsi que par la privation des droits les plus élémentaires (accès à l’eau potable, à une nourriture suffisante, à un toit, à l’éducation, aux soins) pour des centaines de millions d’êtres humains.

La protestation et la résistance contre ce qu’incarne le WEF s’est renforcée au cours des dernières années. Ce qui avait commencé, en 1999, avec une poignée de manifestants devant le centre de congrès de Davos et une cinquantaine de représentants de mouvements sociaux du monde entier réunis lors du premier «Autre Davos», est devenu, aujourd’hui, un mouvement durablement présent, dont les interventions se déploient en écho avec les rencontres du Forum social mondial (FSM).

En Suisse allemande, les mobilisations annuelles contre le WEF sont de fait une des rares occasions où convergent les diverses composantes de la gauche radicale et antinéolibérale, attirant chaque année des centaines de jeunes militants.

Aujourd’hui le mouvement altermondialiste est confronté à des questions que son évolution a contribué à poser. D’un côté, il n’a pas réussi à peser sur les rapports de forces sociaux ni à mettre un coup d’arrêt aux offensives néolibérales. Au contraire, malgré des mobilisations importantes contre la guerre en Irak ou contre le démantèlement social, les gouvernements et les institutions internationales ont approfondi leurs politiques de régression sociale. Il devient de plus en plus évident que le mouvement a besoin de gagner des batailles pour qu’il ne se cantonne pas à un rôle purement idéologique, extérieur aux préoccupations des gens. Mais il est tout aussi évident que des victoires, aussi partielles soient-elles, ne sont aujourd’hui possibles qu’à travers des puissantes mobilisations. Des choix d’orientation, tant du point de vue du contenu des alternatives au capitalisme que des moyens pour y parvenir, s’imposent donc aujourd’hui.

De l’autre, le mouvement est de plus en plus confronté, notamment en Suisse, à une répression et criminalisation croissante de la part de la police et de l’armée. Cette année, le Parlement a encore décidé de mobiliser 6500 soldats durant le WEF. Le but principal de ce dispositif sécuritaire consiste à créer l’ambiance pour susciter des frustrations auprès des manifestants, ce qui justifie ensuite, au nom de la sécurité, de porter de graves atteintes au droit démocratique de manifestation.

Le 22 janvier à Berne

C’est dans ce cadre que le mouvement anti-WEF s’est trouvé, tout au long de l’automne 2004, devant la tâche de construire un cadre commun de mobilisation à la hauteur des enjeux.

D’un côté, les divers groupements impliqués dans la coalition – entre autres les groupes et milieux libertaires et autonomes de Berne et Zurich, attac suisse, le Revolutionärer Aufbau et le MPS – se sont mis d’accord pour élargir la plate-forme contre le WEF aux luttes sociales récentes en Suisse: les luttes des salariés dans diverses entreprises industrielles, les mobilisations contre les mesures d’austérité et de privatisation dans de nombreux cantons, la thématique de la dégradation des conditions de travail et du dumping salarial touchant en première ligne les femmes et les migrants, la résistance contre l’occupation en Irak, etc. Ainsi, la manifestation du 22 janvier à Berne se veut avant tout une expression de la colère sociale contre la dégradation des conditions de vie ici et ailleurs.

De l’autre côté, attac Suisse a pris l’initiative d’ouvrir la conférence internationale «L’Autre Davos» aux questions de stratégie posées ci-dessus, notamment en la déplaçant de Zurich, son assise depuis cinq ans, à Berne, le jour de la manifestation. Organisée avec le soutien d’un grand nombre d’organisations et de réseaux internationaux, l’édition 2005 de «L’Autre Davos» ouvrira le débat sur les perspectives du mouvement altermondialiste et elle est une invitation au mouvement, dans toute sa diversité, à discuter, avec une série de représentants de mouvements d’Europe, d’Afrique, d’Asie et des Etats-Unis, des éléments d’une réponse émancipatrice et des cadres de référence communs pour de futures mobilisations.

 
         
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